Robert Pettinelli
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27 août 2023
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22 novembre 1926, Marseille - 27 août 2023, Marseille
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© Jazz Hot 2023
Robert Pettinelli, documentaire Jazz à Marseille (2016), image extraite de YouTube
C’est une figure historique de
la scène jazz marseillaise qui s’en est allée avec la disparition, à 96 ans, du
saxophoniste Robert Pettinelli qui fut l’un des pionniers du bebop parmi les
musiciens français.
Né à Marseille, Robert Pettinelli reçoit, de 6 à 8 ans, des leçons de
piano et de solfège, mais il interrompt cet apprentissage qui ne l’intéresse
guère. A la veille de la guerre, il découvre le jazz grâce à un cousin plus
âgé qui lui fait écouter les 78 tours de Louis Armstrong, Duke Ellington et Fats Waller, entre autres. En
1945, il s’inscrit à la faculté de pharmacie et, en admirateur de Johnny
Hodges, décide de louer un saxophone alto pour se mettre à l’instrument dont un
ami lui enseigne les rudiments. Par ailleurs, il adhère au Hot Club de
Marseille où il fait la connaissance de ses animateurs, Simone et Paul Mansi, qui organisent des séances d’écoute chez eux alors que les premiers
disques de bebop arrivent par l'intermédiaire des troupes américaines. C’est ainsi que Robert
Pettinelli entend «Cool Blues» de Charlie Parker qui devient son idole absolue.
Il cherche dès lors à assimiler le langage bebop et développe son jeu en
autodidacte. Comme Léo Missir ou Marcel Zanini, il participe ainsi à la vie jazzique
de Marseille –avec des clubs comme la Chistera et le Saint-James–, et ses
environs, en plein développement dans ces années qui suivent la Libération (dans Jazz Hot n°1-1945, Hugues Panassié qualifie Marseille de «nouvelle capitale du jazz»).
L’altiste joue notamment à la tête de son quintet –qui comprend Georges
Arvanitas (p), Eric Vidal (tp), Edmond Aublette (b) et Louis Belloni (dm)– avec
lequel il remporte la «Coupe Jazz Hot» du meilleur orchestre au XIIIe Tournoi
international de 1949 (cf. Jazz Hot n°40) ainsi que le prix
Selmer du meilleur saxophoniste alto. En amont de la compétition, il avait gravé à Marseille une démo sur un disque de cire, sous la supervision d'André Francis, chargé d'effectuer les repérages sur place pour la sélection des groupes(*). Par ailleurs, comme tous les jeunes amateurs, Robert
Pettinelli profite des étapes marseillaises des musiciens en tournée pour
assister à leurs concerts et même partager des jam-sessions. Il se souvenait en
particulier du concert du Dizzy Gillespie Big Band en 1948 à l’Opéra, sous les
sifflets du public pas encore familier du «nouveau jazz». Il aura d'ailleurs la chance de faire le bœuf avec le trompettiste et ses musiciens à Lyon, peu après la Coupe Jazz Hot, ayant été invité à participer à la première partie précédent sa prestation. Il a de même l’opportunité d’ouvrir le concert de Charlie Parker au cinéma Rex de Marseille,
en mai 1949. Mais n’osant jouer de l’alto devant Bird,
il se fait prêter un ténor! Et en décembre 1950, sous le patronage du Hot Club Méditerranéen, il accompagne James Moody sur trois concerts à Marseille.
Robert Pettinelli (2e à gauche), James Moody et Marcel Zanini (au centre), documentaire Jazz à Marseille, image extraite de YouTube
Parallèlement à une carrière professionnelle
passée dans un laboratoire, Robert Pettinelli restera un acteur
du jazz à Marseille dans les décennies suivantes, partageant la scène avec de nombreux jazzmen, comme en 1954 le jeune Barney Wilen (alors âgé de 17 ans) qu'il rencontre lors d'un passage à Nice et qu'il retrouvera à chacune de ses venues dans la Baie des Anges. De même, effectuant régulièrement des séjours professionnels à Paris, il jouera aussi, entre autres, avec René Urtreger, Pierre Michelot, Kenny Clarke, Martial
Solal, Henri Renaud et Jean-Louis Chautemps En 1963, il fut membre du jury de la première classe de jazz du Conservatoire de Marseille dirigée par Guy Longnon. Il
était aussi un pilier du club le Pelle-Mêle sur le Vieux-Port (ouvert en 1979) et participa régulièrement aux jam-sessions du bar Atlantique, tenu par Claude Djaoui (1984-1996) en bordure du Panier. Ces dernières
années, il continuait à se produire dans sa région natale, le jazz de Charlie Parker
toujours chevillé au corps, comme en février 2019, au Rouge Belle de Mai, avec son quartet.
Jérôme Partage
Images extraites de YouTube Avec nos remerciements
* Cette session n'est pas le premier enregistrement bop réalisé par des musiciens français. En effet, Jazz Hot °18 signale dès décembre 1947 celui de l'orchestre de Robert Mavounzy (Disques Swing).
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