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Richie Frost

21 fév. 2023
25 juillet 1927, Los Angeles, CA – 21 février 2023, Santa Fe, NM
© Jazz Hot 2023

Richie Frost sur la Côte Ouest (Californie-Oregon), 2017 © Lynn Frost by courtesy

Richie Frost sur la Côte Ouest
(Californie-Oregon), 2017
© Lynn Frost by courtesy

 
Richie FROST

Paris Dream




Né Donald Frost le 25 juillet 1927 à Los Angeles, Richie, de son prénom de scène, a commencé enfant sur la batterie de cuisine. Sa mère, professeur d’anglais à Hollywood High School, au tempérament d’artiste, soutient son talent en lui offrant une batterie quand il entre au collège où il fait partie d’une formation; il prend de rares cours, mais il apprend facilement à la «feuille», et il ne passe pas par l’université. Dès sa sortie du lycée, il fait son service militaire au sein d’une formation musicale  dans une base du nord de la Californie. A sa démobilisation en 1947, il part vers la Ville-Lumière en cargo, avec sa batterie; à Paris, il joue notamment au Tabou avec Henri Renaud et Jimmy Gourley dont il deviendra l’ami d’une vie, mais aussi avec les artistes afro-américains venus chercher un peu de répit pour eux et de respect pour leur musique. C’est ainsi qu’on trouve de multiples enregistrements de Richie Frost essentiellement pour Swing puis Vogue, les deux labels jazz créés par Charles Delaunay: avec Hubert Fol & His Be Bop Minstrels(1) en novembre 1948; avec Don Byas/James Moody (ts), Lucien Simoens (b), Bernard Peiffer (p) en juillet 1949 (Esquire/Blue Star); avec Bill Coleman (tp), Paul Vernon (ts), Jack Diéval (p), Emmanuel Soudieux en octobre 1949; James Moody (ts), Nat Peck (tb), Jack Diéval (p), Emmanuel Soudieux (b), Annie Ross (voc) en février 1950; Don Byas (ts), Geo Daly (vib), Christian Chevalier (p), Pierre Michelot (b) en juillet 1952, chez Vogue.

1948. Jack Dieval & Son Quartette, Tea for Two/Don't Blame Me, Swing





En décembre 1952, Henri Renaud disait dans Jazz Hot n°72: «Nous avons eu récemment en France trois musiciens américains de valeur susceptibles d’enseigner quelque chose aux solistes français. Ce sont Sandy Mosse, Richie Frost et Jimmy Gourley. Ce dernier est resté en France comme boursier de l‘Etat français. Sandy Mosse, dont l’influence sur un musicien tel que Bobby Jaspar est prédominante, n’a jamais manqué de travail depuis son départ dans les pays voisins musicalement plus évolués. Richie Frost a dû repartir également, mais son court séjour au Tabou a eu une influence décisive sur de nombreux drummers français comme Jean-Louis Viale, Bernard Planchenault, Roger Paraboschi.»


De gauche à droite: Jimmy Gourley (g), X., Jay Cameron (sax), Richie Frost (dm) à Paris en 1954 © Collection Rolande Gourley by courtesy




De gauche à droite: Jimmy Gourley (g), X., Jay Cameron (sax),
Richie Frost (dm) à Paris en 1954
© Collection Rolande Gourley by courtesy




Quand Richie Frost repart en 1954, il travaille un temps dans le jazz, gravant à Los Angeles en octobre, un disque pour Vogue, avec le leader Lyle Spud Murphy (perc,arr,comp, 1908, Berlin-2005, Hollywood), Russ Cheever (ss), Frank Morgan/Benny Carter (as), Buddy Collette (ts), Bob Gordon (bar), Buddy Clark (b); puis il prend le virage du rhythm & blues plus porteur début mars 1958, avec l’album de Johnny Burnette/Dorsey Burnette (g), avec Roy Brown (voc), James Kirkland (b) toujours pour Imperial-Los Angeles, avant de se faire happer par l’industrie du rock & roll et de la country, en essor par la consommation de masse avec Ricky Nelson, un concurrent d’Elvis Presley. Il l’accompagne jusqu’en 1969, enregistrant chez Imperial puis Decca.


En 1956, installé à Burbank, à 15 kms de Los Angeles, Richie se marie avec Yvonne, puis ils ont deux enfants entre 1957 et 1962, sans doute des responsabilités familiales lourdes qui l’amènent à travailler dans la musique commerciale en 1958. Après 1968 et dans l’air du temps de la révolution beatnik, le couple décide de repartir au grand air, en Oregon dont Yvonne est native; en 1969, Tualatin est une communauté de 800 âmes (10 000 habitants aujourd’hui), dans la banlieue sud de Portland, où ils montent un très petit restaurant qui ne sert que des aliments frais, une rareté à cette époque. Nœud routier d’un boom économique local, et eux-mêmes pionniers du retour à une nourriture saine, leur succès les fait déménager à proximité dans un espace beaucoup plus grand vers 1975: le Rich's Kitchen & Parlour ouvre sur un créneau sain-gastronomique, et Richie y joue en trio de nouveau du jazz avec Marianne Mayfield (b,voc, 1936, Fresno, CA-2004, Springfield, OR). Ils vendront puis rachèteront ce restaurant à la suite de différends avec des partenaires d’affaires, et transforment en parallèle leur précédent petit lieu sous l’enseigne combative «Gringo's Revenge» (la revanche de l’étranger!) où ils servent de la cuisine mexicaine.


Début les années 1980, l’agriculture biologique les motivant de plus en plus, ils participent activement aux premières démarches de certifications bio, puis abandonnent la restauration pour créer en 1982 une ferme biologique à Tualatin qu’ils revendent pour en créer une autre en 1995 à Jefferson, à 90 kms au sud. En 2006, Richie et Yvonne ont un grave accident de voiture et se séparent. Lynn, leur fille, ramène Richie chez elle pour suivre sa longue et partielle convalescence, d’autant qu’ayant une dégénérescence maculaire depuis le tournant du millénaire, il devient progressivement aveugle, il ne peut plus lire, une de ses passions qu’il remplace par son chien et ses chats. Suite à la crise de 2007 aux Etats-Unis, la seconde ferme, tenue alors par son frère ainé, est finalement saisie par la banque en 2010.


Avec Jimmy et Rolande Gourley, France, années 1980 © Photo X, Collection Rolande Gourley by courtesy
Avec Jimmy et Rolande Gourley, France, années 1980 © Photo X, Collection Rolande Gourley by courtesy


Richie s’est éteint très entouré par sa fille Lynn qui elle-même a choisi de travailler dans ce secteur de la production et de la cuisine biologique, à Santa Fe au Nouveau Mexique. Lynn écrit: «C'est avec un profond chagrin que je dois vous dire que mon père a quitté la Terre. Je l'ai ramené à la maison le 14 février après deux jours à l'hôpital. Il est décédé paisiblement le 21 février.». Lynn conclut son propos en rappelant: «les meilleurs souvenirs de la vie de mon père ont toujours été ceux où il jouait du jazz à Paris! Et même s'il a pu s'y rendre plusieurs fois et y vivre quelques années, il a toujours rêvé d'y retourner.»(2) Rolande Gourley et l’équipe de Jazz Hot présentent leurs amicales condoléances à sa famille et ses amis.

Rolande Gourley
Photos Collection Rolande Gourley by courtesy
Renseignements et photo Lynn Frost by courtesy
Avec nos remerciements

1948. Hubert Fol & His Be-Bop Minstrels, Lover Come Back to Me/Now Cut Out, Swing




1. Be Bop Minstrels: Hubert Fol (as), Raymond Fol (p), Dick Collins (tp),

Alf Totol Masselier (b), Richie Frost (dm)
NB: retrouvez plus d’articles dans
Jazz Hot concernant les musiciens cités.


2. «It is with deep sorrow that I must tell you my Pops has left this earthly plane. I brought him home on hospice on February 14 after a two day hospital stay. He passed peacefully on February 21.»

«… my father’s very best memories of his life were always about the time he spent playing jazz in Paris!!!! And even though he was able to go a number of times and lived there for some years, he always dreamt of going back.»



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