Duffy Jackson
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3 mars 2021
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3 juillet 1953, Freeport, NY - 3 mars 2021, Nashville, TN
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© Jazz Hot 2021
Duffy Jackson avec le big band d'Illinois Jacquet, Jazz à Vienne, 1993 © Pascal Kober
Duffy JACKSON
«Put the grin on the groove and aim the beat at your feet!*» Duffy Jackson (son mantra selon l'information donnée par sa sœur Jaijai Jackson)
*Mets un sourire sur le groove et le rythme à tes pieds!
Batteur, mais aussi contrebassiste, pianiste et chanteur, Duffy Jackson était
un enfant de la balle, tombé tout petit dans la marmite du swing, où l’a poussé son
père, le contrebassiste Chubby Jackson (25/10/1918, New York, NY - 1/10/2003, Rancho Bernardo, CA), ancien membre des orchestres de Woody
Herman, J.J. Johnson et Gerry Mulligan. L’extrême précocité de la carrière
professionnelle de Duffy Jackson lui a permis de partager la scène avec les derniers géants du
jazz –Count Basie, Duke Ellington, Ella Fitzgerald, Lionel Hampton, Illinois
Jacquet, Dizzy Gillespie, entre autres–, dès le début des années 1960. Telle a été la formation
de ce batteur au groove explosif: les côtoyer au quotidien, depuis sa naissance. Son abord du jazz, tout au long de sa vie, n’a été que le
prolongement d’une grande tradition musicale qu’il ne tentait pas de reproduire car il la vivait directement et intensément, indépendamment de l’époque qu’il a traversée et de
tout phénomène de mode. Doté d’un extraordinaire sens du spectacle qu'il aimait agrémenter de
clowneries facétieuses, Duffy Jackson était pour autant un maître dans
son art, une force d’expressivité avec laquelle il a surmonté toute sa vie de
récurrentes difficultés de santé.
Jérôme Partage Photos Pascal Kober, Lisiane Laplace et Maï-Maï, YouTube Remerciements à tous, particulièrement à Jaijai Jackson, Harry Allen, Dany Doriz, Michel Pastre et Alvin Queen
Duffy Jackson, Jazz Ascona, Suisse, 27 juin 2005
© Lisiane Laplace
Duffy (Duff Clark) Jackson est né
le 3 juillet 1953 à Freeport, Long Island, NY. Fils du contrebassiste, chef d’orchestre et vedette de télévision Greig
Stewart Jackson, dit «Chubby» Jackson, il a grandi à New York. Duffy a été immergé dans le jazz dès sa
naissance. Sa mère chante dans un contexte non professionnel et ses deux
sœurs suivront son exemple. Le petit Duffy vit au milieu des disques, des
instruments et des musiciens qui passent au domicile familial, notamment Count Basie. Et quand son père organise une
grande jam-session à la maison, avec des jazzmen de Chicago, où la famille
réside alors, pas question de dormir, même s’il n’a que 3 ans! De plus, Chubby
emmène son fils jouer des balais à l’église.
De fait, Chubby restera le premier
mentor et la référence absolue de Duffy: «J’ai
bénéficié d’un enseignement peu ordinaire puisque j’ai appris à partir du point
de vue de bassiste de mon père. Tout ce qui est du rythme, des accents, de la
pulsation et de l’interaction au sein de
la rythmique, je l’ai appris par l’un des bassistes les plus swinguants de tous
les temps.»(1)
Chubby instille ainsi dans l’expression de son fils la prédominance du rythme
et l’énergie nécessaire à l’inspiration des danseurs: la danse restera ainsi une
dimension essentielle du jazz pour Duffy(2).
Chubby l’initie également à la contrebasse mais Duffy optera pour la batterie
afin de pouvoir jouer à ses côtés. Par ailleurs, il reçoit ponctuellement des
leçons par des batteurs de l’entourage paternel: «En 1957, mon père enregistrait un album en big band à Chicago(3). Et
il y avait là un célèbre batteur avec lequel il avait joué au sein du Woody
Herman Orchestra: Don Lamond. Il est alors devenu mon premier professeur,
j’avais 4 ans. (…) Don est resté avec nous à Chicago pendant deux semaines, le
temps de l’enregistrement, et il a vu que je m’étais approprié un set de bongos
que ma mère avait offert à mon père pour son anniversaire, alors qu’il
détestait les bongos car il trouvait qu’ils couvraient la contrebasse. A la
maison, je tapais sur ces bongos pour suivre le rythme des disques que
j’entendais. Alors, Don est allé me chercher une grosse caisse, une caisse
claire, une cymbale et une charleston et m’a appris comment faire "chh chu chu
chh". Aujourd’hui, je dis que je suis un gars 2 et 4 dans un monde 1 et 3.»(4) Les
prestations télévisées de Chubby Jackson, dans les années 1959 et 1960, sont
l’occasion pour Duffy d’entrer très jeune dans le «métier»: «(Mon père) était l’invité permanent, à
Chicago et à New York, des films Les Petites Canailles (Little Rascals). Et à New
York, il travaillait dans une émission enfantine matinale avec les musiciens locaux d’ABC: ainsi, à 8h du matin, vous entendiez un groupe de
18 musiciens swinguer d’enfer. Les gars étaient tous ivres ou défoncés ou
étaient restés éveillés toute la nuit, mais le fait est que mon père avait des
petits enfants qui dansaient et chantaient devant l’orchestre. (…) J’ai
participé à cette émission au moins cent cinquante fois. Je suis passé à la
télévision environ trois cents fois entre 5 et 12 ans.»(4) Enfant prodige et célébrité précoce, Duffy, à
peine âgé de 5 ans, pose dans DownBeat
où, sous le surnom de «Jazz Jackson», il déclare déjà qu’il veut intégrer le
Count Basie Orchestra! Ce sera effectivement la grande ambition de la première
partie de sa vie. En attendant, les clubs de jazz où son père se produit sont
le lieu privilégié de son initiation, dès 10-11 ans.
Le jeune Duffy reçoit les encouragements de plusieurs grands
batteurs: Louie Bellson, Gene Krupa, Buddy Rich (qui l’invitera même à le
rejoindre sur scène en concert à trois reprises, entre 14 et 19 ans). Mais
c’est sans doute Sonny Payne, le batteur du Count Basie Orchestra, qui le
marque le plus. Duffy a seulement 10 ans quand, après l’avoir emmené dans une
pizzeria pour parler batterie, Sonny Payne le fait ensuite asseoir sur scène, à
côté de lui, pendant le concert, à la grande stupéfaction du Count! Deux ans plus
tard, Duffy se retrouve cette fois à tenir les baguettes pour le prestigieux
big band. Effectuant un remplacement, Don Lamond lui cède la place durant le
dernier set d’une soirée au Riverboat Restaurant, au pied de l’Empire State
Building: «On s’est mis à jouer "Shiny
Stockings", le grand classique de Frank Foster. Harry Sweets Edison, Marshall
Royal et tous les membres historiques du groupe étaient encore là. Ça
swinguait, les gens dansaient et l’orchestre s’est mis à jouer de façon très
douce, prélude à un final déchaîné. Tout le monde s’est arrêté de jouer et, ne
connaissant pas les arrangements, je me suis donc dit que je devais m’arrêter
aussi. Basie s’est alors tourné vers moi et a crié: "Joue petit!".»(5) Quelques
années plus tard, alors que les Jackson sont établis à Miami, FL, depuis la fin
des années 1960, et que père et fils travaillent régulièrement ensemble, Duffy a
de nouveau l’occasion de partager la scène avec Count Basie. Alors qu’il
accompagne avec Chubby la chanteuse Edie Adams, il se précipite à la fin du concert
pour assister au dernier set du big band, qui passe non loin de là. «Sonny Payne était à la batterie et
apparemment il avait fait quelques excès d’alcool. Basie m’a alors demandé si je voulais jouer. J'ai bien sûr accepté, et j’ai couru vers la batterie. Le premier
titre que nous avons joué était "Shiny Stockings". Donc, quand on est arrivé au
passage où la batterie doit jouer seule, Basie m’a regardé fixement, et je lui
ai dit: "Ne t’inquiète pas, je crois que je sais ce que j’ai à faire
cette fois!" Je suis arrivé au bout du morceau, et Basie m’a gardé pour dix
titres supplémentaires.»(5) Quatre jours plus tard, Count Basie appelle Duffy
en urgence pour remplacer Sonny Payne qui vient de perdre son épouse. Après une
première soirée de passage de relais, durant laquelle Duffy a l’occasion
d’apprendre longuement de Sonny, il effectue son remplacement pour deux soirs. Duffy
est bien entendu comblé par cette expérience extraordinaire et même un peu
incrédule!

Duffy Jackson, Caveau de La Huchette,
Paris, 24 juillet 2003 © Maï-Maï
Encore lycéen, Duffy Jackson fait la rencontre de Monty Alexander: «A Miami, en février 1971, dans le club Place for Steaks, Monty jouait avec son trio: Eugene Wright, le bassiste du Dave Brubeck Quartet, et Dave Nuby, un batteur local très swingant. J'étais là à manger mon steak et tout d'un coup, j'ai entendu ce groove! (...A la fin de son set) un pianiste a pris la place de Monty. Je suis allé le voir et je lui ai demandé: "Est-ce que je peux jouer un morceau avec vous pour que Monty m'entende?" (...) C'est comme ça que j'ai connu Monty et qu'il m'a invité à se joindre à lui pour le set suivant.»(6) Quelques mois plus tard, Duffy achève sa scolarité au Miami Beach
High School. «J’ai été convoqué dans le
bureau du directeur. Je me demandais ce que j’avais bien pu faire. Je ne
comprenais pas ce qu'il se passait. Je suis entré dans son bureau, mon père était
là. Le directeur s’est avancé vers moi, m’a embrassé sur la joue, m’a donné une
accolade et m’a annoncé: "Tu as obtenu ton bac. Ray Brown et Milt Jackson ont besoin
de toi demain soir en Californie pour un gig au Shelly Manne’s Hole."
J’avais joué avec Monty Alexander en trio et c’est lui qui m’avait recommandé
auprès de Ray Brown.»(5)
Dans les heures qui suivent, Duffy s’envole
pour Los Angeles où Ray Brown l’accueille à l’aéroport pour un engagement de trois semaines à Hollywood en compagnie de Milt Jackson, Teddy Edwards et Monty Alexander. «C'était ça mon cadeau de fin d'études (...)»(6) Duffy passe le reste de l'été 1971 à New York, dans le groupe de Monty Alexander, à animer les soirées dansantes du Riverboat. C'est au cours de ce même été qu'il grave à ses côtés son premier disque en sideman: Here Comes the Sun (MPS). Dans la foulée, il s’installe
à Los Angeles. «Je suis allé en
Californie, j'ai joué avec tous ces grands musiciens, et j'ai été la coqueluche
d'Hollywood pendant trois semaines. J'avais beaucoup d'acteurs et d'actrices
célèbres assis juste à côté de moi pendant que je jouais, c'était vraiment
surréaliste.
Puis, je suis devenu le batteur de Lena Horne.»(4) Sur la seule recommandation
de Louie Bellson, Duffy est engagé à 18 ans, pour une tournée d'un an, par la chanteuse et comédienne. «Mon père et Lena avaient été associés dans l'orchestre de Charlie Barnet, au début des années 1940, avant que mon père ne rejoigne Woody Herman. Alors Lena a pris un soin particulier du petit Duffy.»(5) Puis, de 1974 à 1976, Duffy
Jackson, de nouveau par l’entremise de Louie Bellson, travaille avec Sammy Davis
Jr., une expérience intense. «D’une
certaine façon, j’ai été un de ses protégés: j’aime jouer de la musique, j’aime
jouer un peu la comédie, et Sam et moi nous jouions de la batterie et tap-dansions
ensemble sur la scène. Il chantait et tap-dansait, puis je prenais un solo de
batterie, et parfois nous échangions les rôles. (…) Il me faisait travailler
très dur, je méritais mon salaire mais j’ai beaucoup appris. (…) D’avoir été le
batteur de Sammy Davis Jr. m’a aussi permis d’accompagner nombre de grandes
stars, Billy Eckstine, les Nicholas Brothers à Broadway avec Sammy, un tas de
chanteurs célèbres qui travaillaient avec lui. Puis je me suis dit que je
préférais rester dans le jazz plutôt que d’entrer dans le show biz.»(2) Car c’est bien l’éclat du
swing des big bands qui émerveille Duffy et non les paillettes d’Hollywood.
Ainsi, il s’embarque pour plusieurs mois de tournée avec Monty Alexander.
Malgré un premier passage dans l'orchestre de Lionel Hampton, sa quête du Graal reste le poste de
batteur du Count Basie Orchestra, occupé par Butch Miles depuis 1975. «Count Basie prenait de l’âge et j’espérais
que mon tour vienne avant qu’il ne soit trop tard. Mais Butch avait à cœur de
donner l’occasion à d’autres batteurs de jouer dans l’orchestre. Un soir, je
reçois un appel de Count Basie: "Comment va, Duffy, que fais-tu en
ce moment? —J’attends juste que Butch quitte l’orchestre pour prendre la
place!" Il s’est alors passé quelque chose d’unique: Count Basie et Butch Miles
m’ont donné sept mois pour me préparer. Ainsi, j’ai rassemblé une cinquantaine
d’enregistrements de l’orchestre, depuis les années 1950 jusqu’à la période
présente, et je les ai étudiés jour et nuit; parfois je m’endormais avec le
casque sur la tête. Et quand j’ai intégré l’orchestre, je n’avais pas besoin de
lire une note. (…) Je gardais les yeux sur le Count en permanence. Au moindre
de ses gestes, je savais ce qu’il voulait. Il m’a tellement appris. Il n’avait
rien besoin de dire, il suffisait qu’il me regarde. Je pense que Dieu m’a mis
sur la Terre pour être le batteur de Count Basie.»(5) Sa préparation de sept mois inclut sa participation aux 75 ans du Count en avril 1979, puis il devient batteur en titre en août, pour un an. La période est d'une grande richesse pour le batteur qui se produit auprès de son idole dans différents contextes.
Cependant,
le rythme effréné des tournées est difficile à tenir physiquement pour Duffy,
qui aura à subir plusieurs opérations de la hanche au cours de son existence.
Il est ainsi contraint par intermittence de se tenir à l’écart du groupe. «En fait, j’aimais encore
plus jouer avec Basie dans les engagements privés pour les danseurs que dans
les concerts. Le feeling était entièrement différent, de même que les
arrangements. Les gens pouvaient danser au pied de la scène, ils étaient à quelques
centimètres seulement de Basie. C’était plus relax.»(5) Au sein du big band, il a également l’opportunité
d’accompagner les plus grands, notamment lors d’une cérémonie au Kennedy Center de Washington, DC, le 2 décembre 1979, en l'honneur d'Ella
Fitzgerald, à laquelle participent également Joe Williams, Jon Hendricks
et Peggy Lee. Il a enfin l’occasion de côtoyer, au sein de l’orchestre, Freddie
Green, une autre de ses influences principales: «J’étais avec le Count Basie Band à Cincinnati où nous devions nous
produire avec le Cincinnati Symphony Orchestra. Nous étions en répétition, en
train de jouer un passage très doux et précis. A la fin du morceau, Freddie
Green s’est tourné vers moi et m’a dit: "Donne à chaque temps (beat) sa valeur
entière". (…) Freddie était vraiment un maître pour moi. Quand j’ai quitté
l’orchestre, j’ai reçu de sa part, après le dernier concert, la plus grande
accolade qu’il m’ait jamais donnée. C’est la dernière fois que je l’ai vu.»(5)
On revoit Duffy ensuite auprès de Lionel
Hampton et dans deux disques enregistrés au Japon en 1982 pour le label Paddle Wheel: Lionel
Hampton Swings With George Kawaguchi et Lionel
Hampton All Stars, Air Mail Special: Live in Japan '82. La rencontre de ces deux
tempéraments de showmen crée évidemment des étincelles en concert, notamment lors de leurs fameuses drums battles! Après la disparition de Count
Basie, il retrouve le big band en 1985, passé sous la direction de Thad Jones.
Mais ses problèmes de santé l’obligent à se mettre en retrait durant plusieurs
mois. Il retourne alors vivre en Floride auprès de son père, avec lequel il se
contente de jouer deux soirs par semaine durant sa convalescence, avant de
retrouver l’effervescence de la scène new-yorkaise et des engagements plus
importants. Il effectue d’ailleurs un ultime retour dans le Count Basie
Orchestra en 1989 (direction Frank Foster), qu’il doit une nouvelle fois quitter, au bout de dix-huit
mois, en raison de sa santé, après avoir participé à trois albums dont l’un avec Jon Hendricks et l’autre avec George Benson.

Philippe Duchemin (p), Patricia Lebeugle (b), Duffy Jackson (dm), Caveau de La Huchette, Paris, 24 juillet 2003 © Maï-Maï
La décennie suivante voit encore de belles collaborations:
notamment avec Turk Mauro et Harry Allen qu'il accompagne sur trois disques en 1994 et 1996. «Duffy était un
ami proche, un batteur et un showman incroyables. Il pouvait également jouer
très bien du piano, de la contrebasse, scattait mieux que la plupart des
chanteurs, tout en faisant rire le public.», se souvient Harry Allen. «Un soir, nous jouions à Chicago, au Jazz
Showcase de Joe
Segal, l’un des meilleurs clubs du monde, qui cette fois-là était
situé dans le magnifique et historique Blackstone Hotel. A un moment, Duffy
prend un solo avec les balais et, au point culminant de son chorus, il les
lance en l’air pour les rattraper ensuite. Mais le plafond était très haut et
les balais ne sont jamais retombés, ils sont restés coincés sur un petit
rebord. Cela a bien sûr stoppé net le morceau car aucun d’entre nous ne pouvait
s’arrêter de rire!»
Durant les années 1990 et 2000, Duffy est
régulièrement invité par Dany Doriz au Caveau de La Huchette où il
fait évidemment le régal des danseurs: «La première fois que j'ai rencontré Duffy et joué avec lui, c'était dans le big band d'Illinois Jacquet, à la Grande Parade de Nice (1988). Quelques temps plus tard, il est revenu avec le big band d'Illinois Jacquet au Méridien, et là on a eu d'avantage l'occasion de sympathiser. Puis, j'ai commencé à le faire venir au Caveau en 1993 et à organiser des tournées avec lui qui ont très bien marché. Il est venu environ deux mois et demi, presque chaque été, jusqu'en 2003. Le premier quartet, avec lequel on a enregistré My Favorite Vibes (1993), comprenait rien de moins qu'Eddie Jones et Georges Arvanitas. Mais Eddie et Duffy se sont fâchés: Duffy avait l'habitude, au cours des concerts, de laisser sa batterie et de se mettre au vibraphone avec moi. Un soir au Caveau, en s'avançant vers le vibraphone, il a poussé Eddie Jones qui l'a très mal pris. S'en est suivi une terrible dispute après le show. Et Eddie n'a plus jamais voulu jouer avec Duffy. Duffy n'était pas toujours très diplomate, mais pour moi, c'est un des plus grands. Il avait une immense maîtrise de son instrument, scattait à la perfection. Il était très doué.» A La Huchette et en tournée, plusieurs musiciens se succèderont auprès de Duffy: Nicolas Montier, Michel Pastre (ts), Philippe Duchemin, Philippe Milanta (p), Bruno Rousselet ou encore Patricia Lebeugle
(b) que Duffy annonçait sur scène avec son accent: «Patricia Lebeugeuleu». Avec eux, Duffy assure le spectacle, électrisant
le public conquis par l’énergie, la vie et l’âme. Duffy se produit aussi
en invité du big band de Michel Pastre en mai 2004 au Jazz-Club Lionel
Hampton (Hôtel Le Méridien): «Il était magnifique tant sur le plan
humain que musical. C’était quelqu’un de touchant, de facétieux qui amenait
toujours une joie de vivre, un swing dans la vie. On avait une profonde amitié,
il me parlait comme un grand-frère.» Les dernières tournées françaises de Duffy Jackson passent par le Sunset-Sunside en août 2011 et mai 2012, avec notamment
Nicolas Dary (ts), et par le Méridien en mars
2013 avec Michel Pastre.

Duffy Jackson avec François Biensan (tp), Jazz Ascona, Suisse, 28 juin 2011 © Lisiane Laplace
Installés depuis plusieurs années en Floride,
Duffy Jackson et son épouse Marina, fatigués d’affronter les tempêtes et les
ouragans –en particulier le terrible ouragan Katrina en 2005– s’établissent, à
la fin des années 2000, à Nashville, TN, ville musicale –mais pas de tradition
jazz– au climat plus clément. Duffy y poursuit son activité, devient
rapidement une figure de la scène jazz locale, en résidence au Rudy’s Jazz Room, tenant volontiers le piano,
et à l’Acme Feed and Seed. Invité régulier du Nashville Jazz Workshop, il
y transmet son héritage artistique, celui de son père, de Count Basie, de Lionel Hampton, sa
conception du rythme, sa relation avec les danseurs. Il s'y produit aussi avec son big band, dans la filiation Basie évidemment.
Après plus de cinquante ans de carrière dévouée au swing,
Duffy Jackson s’en est allé à 67 ans, à la suite de complications survenues
après une énième opération de la hanche dans une période sans doute peu propice car obnubilée par le covid. Sa sœur Jaijai Jackson nous a offert ce
joli témoignage: «Je me souviens de ces
nombreuses nuits à regarder mon grand-frère jouer de tout son cœur pour les
gens. Je chéris ces souvenirs. Combien j’ai été fière d’être sa sœur et de le
soutenir dans son excellence accompagnée de tant de sueur et de larmes. Mon
frère a eu des défis physiques à relever toute sa vie, mais c’était aussi
quelqu’un de très profond avec un cœur extrêmement sensible qui pouvait fondre
totalement. Il a toujours su saisir l'occasion de "mettre un sourire sur le groove
et le rythme à ses pieds", c'était son mantra. Depuis son décès, j’ai choisi de
continuer avec le souvenir du sourire de Duffy en moi, de ses réparties comiques, de ses
pitreries stupides (avec la langue) sur la batterie et des nuits émouvantes où il jouait du
piano. J'ai admiré mon frère toute ma vie, et je le garderai dans mon cœur pour
toujours.»
Nos pensées vont aux amis et à la famille de Duffy, son
épouse Marina, ses deux sœurs Myno Tayloe et Jaijai Jackson. Jazz Hot partage leur peine.
1. Interview de Duffy
Jackson dans Jazz Hot n°572, juillet-août
2000.
2. Interview de Duffy
Jackson dans Jazz Hot n°607, février
2004 (dossier Le Jazz et la Danse).
3. Il s’agit
probablement de l’album du Chubby Jackson’s Big Band, I’m Entitled to You (Argo 625), enregistré à Chicago le 4
novembre 1957.
4. Interview de Duffy
Jackson par Paul Howard, MusicMecca.org, 28 octobre 2019: https://musicmecca.org/an-interview-with-nashvilles-jazz-big-band-drum-legend-duffy-jackson
5. Interview de Duffy
Jackson par Monk Rowe, Hamilton College, Clinton, NY, 17 octobre 1995: https://www.youtube.com/watch?v=ZSdhy6fMevY
6. Interview de Duffy Jackson par Zev Feldman (5 août 2020), livret de l'album Monty Alexander, Love You Madly: Live at Bubba’s, Resonance
2047.

DUFFY JACKSON et JAZZ HOT
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DISCOGRAPHiE
 1994. Duffy Jackson, Swing! Swing! Swing!, Milestone
Leader/coleader
LP 1981. Chubby Jackson/Duffy Jackson/Summer Festival All Star Jazz Band, Live From Erny’s, Spinnster 0001
CD 1994. Duffy Jackson, Swing! Swing! Swing!, Milestone
9233-2
CD 1997. Duffy Jackson's French Connection, Mastermix 00119
Sideman
LP 1971. Monty
Alexander, Here Comes the Sun, MPS 21.20913 (=CD 0212406)
LP 1978. The Monty
Alexander 7, Jamento, Pablo 2310.826 (=CD 15025)
LP 1978-79. Groover
Mitchell, Meet Groover Mitchell, Jazz Chronicles 104
LP 1978. Chubby
Jackson Featuring Nat Adderley and Arnett Cobb, Lucky 7, Time Is 9807
CD 1978. Chubby
Jackson All Star Band, Live at The Swiss Chalet, Miami, Florida 16 October 1978, Jazz Band 2141-2
LP 1979. Eddie
Miller’s New Yorkers, It’s Miller Time, Famous Door HL131
LP 1980. Count Basie, Kansas City Shout, Pablo 2310.859 (=CD 98846)
LP 1980. Ira
Sullivan, The Incredible Ira Sullivan, Stash 208 (=CD The Incredible Hank Jones
Meets Louie Bellson & Ira Sullivan, Stash 533)
LP 1980. Cleveland
Eaton and His Orchestra, Strolling With the Count, Ovation 146222
LP 1981. Harry Sweets
Edison/Sonny Stitt, Sonny, Sweets & Jaws, Who’s Who 21022 (=CD Point Productions 2621552)
LP 1981. Sonny Stitt, Sonny, Who’s Who 21025 (=CD Cleo 5026)
LP 1982. Lionel
Hampton Swings With George Kawaguchi, Paddle Wheel 6170
LP 1982. Lionel
Hampton All Stars, Air Mail Special: Live in Japan '82, Paddle Wheel 6211
CD 1982. Monty Alexander, Love You Madly: Live at Bubba’s, Resonance
2047
LP 1982. Monty
Alexander Trio, Look Up, Atlas 27-1021 (=CD Dan 70986)
CD 1987. Illinois Jacquet & His Big Band, Jacquet’s Got It!, Atlantic
81816-1
CD 1987. The Fabulous Jimmy Dorsey Orchestra, Dorsey, Then and Now, Atlantic 81801-1
CD 1989. Count Basie Orchestra Directed by Frank Foster, The Legend, The Legacy,
Denon 73790
CD 1990. Jon Hendricks and Friends, Freddie Freeloader,
Denon 76302
CD 1990. George Benson, Big Boss Band, Warner Bros. 7599-26295-2
CD 1991. Roy Gerson, That Gerson Person, The Jazz Alliance
10012-2
CD 1993. Othello Molineaux, It’s About Time, Big World 2010
CD 1993. Dany Doriz, My Favorite Vibes, Big Blue Records 9414
CD 1994. Harry Allen Quartet, Blue Skies, John Marks Records
9
CD 1994. Harry Allen, The King, Nagel-Heyer
011
CD 1994. Billy Ross, The Sound: Tribute to Stan Getz,
Milestone 9227
CD 1994. Phil Flanigan, New York Toast, Philophile 7701
CD 1995. Turk Mauro, Hittin’ the Jug, Milestone 9246-2
CD 1995. The Manhattan Transfer,
Swing, Atlantic 83012
CD 1995. Terry Myers, Soul Mates, Contemporary 14078-2
CD 1996. Harry Allen Quartet, Live at Renouf’s, Master Mix
00117
*
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VIDEOGRAPHIE par Hélène Sportis
 Duffy Jackson Big Band avec le pasteur Johnny Minick (p), Smyrna, TN, 2012, image extraite de YouTube
Chaîne YouTube de Duffy Jackson
https://www.youtube.com/user/DuffJackson/featured
Chaînes YouTube de Chubby Jackson, (b,lead)
https://www.youtube.com/channel/UCSX5M5bMhdn1J2-A3qC36Qw/playlists
https://www.youtube.com/channel/UCCK7KEPIhntzrtRpMrVXrVg
2000. Chubby Jackson, interview, histoire du jazz, NAMM
Foundation, 1er août
https://www.namm.org/library/oral-history/chubby-jackson
1978. Live at The Swiss Chalet, Miami, FL, 16 October, album
Chubby Jackson's All Star Band Featuring Arnett Cobb, Frank Rosolino, Nat Adderley,
Pete Minger, Jay Corre, Danny Turner, Duffy Jackson, 16 octobre, Jazz Band
Records
https://www.youtube.com/watch?v=rq-NX_IeAzw&list=OLAK5uy_nwBQkliftCe_kaA1Qq9-8gxhmR_v0W4OY
1979. Duffy Jackson, Count Basie (p), Roy Eldridge (tp), Zoot
Sims (ts), Cleve Eaton (b), PBS Social, Special Midnight, «Booty's Blues»
https://www.youtube.com/watch?v=bCx5_-P4EH4
https://www.youtube.com/watch?v=5YHEWFdhEMc
1979. Duffy Jackson, Count Basie 75' Birthday, Kansas City,
MO
https://www.youtube.com/watch?v=c1pORNDBkYs
1980. Duffy Jackson, Count Basie Big Band, «Wind Machine»,
The Big Show
https://www.youtube.com/watch?v=XmrfTvmhqG4
1984. Duffy Jackson, Lionel Hampton Big Band, DisneyLand, CA
https://www.youtube.com/watch?v=-vx8xHVTSRU
https://www.youtube.com/watch?v=dotT4vK3rEE
https://www.youtube.com/watch?v=iQAezj4Hmb4
1990. Duffy Jackson, Count Basie Orchestra, «Wurlibird»,
Newport Jazz Festival, RI, 19 août
https://www.youtube.com/watch?v=ZAOBqJ3s_VM
1995. Duffy Jackson, interview par Monk Rowe, Hamilton College,
Clinton, NY, 17 octobre
https://www.youtube.com/watch?v=ZSdhy6fMevY
1995. Duffy Jackson, Illinois Jacquet Big Band, « Flying
Home », Jazz à Vienne
https://www.dailymotion.com/video/x2zd5y
1996. Duffy Jackson, Dany Doriz (vib), Georges Arvanitas
(p), Nicolas Montier (ts), Marc Richard (as), Bruno Rousselet (b), «Cherokee»,
Caveau de la Huchette, Paris, video Robby Ménière
https://www.youtube.com/watch?v=Vn6rc3zfvQY
2005 & 2011. Duffy Jackson, à Jazz Ascona, avec Serge
Rahoerson (p,ts), Manu Marches (b), Michel Pastre (ts), Luigi Grasso (s),
Pasquale Grasso (g), Nicolas Dary (s), John Allred (tb), juin
https://www.youtube.com/watch?v=h-MZPUp1PwU
https://www.youtube.com/watch?v=dqZ7X1HfGUo
https://www.youtube.com/watch?v=AULgpUVEdzY
https://www.youtube.com/watch?v=nQ-IfmNGqsA
2010 & 2012. Duffy Jackson, Lori Mechem (p), Denis Solee
(ts), George Tidwell (tp), Roger Spencer (b), et en Big Band, Nashville Jazz
Workshop at Jazz Cave, TN, 25 juillet 2012
https://www.youtube.com/watch?v=qFXCmdYt1p4
https://www.youtube.com/watch?v=gOkJcLK65DM
https://www.youtube.com/watch?v=lcnELG_kAoI
2011. Duffy Jackson Big Band, «Topsy», «When Will We Meet
Again», Nashville Jazz Workshop, TN, 23 février
https://www.youtube.com/watch?v=PAmevTGzWJ8
https://www.youtube.com/watch?v=dtASpGfnMew
2012. Duffy Jackson Big Band & le pasteur Johnny Minick,
«Campbell's Gamble», Smyrna, TN
https://www.youtube.com/watch?v=omE6TYqtt_U
2012. Duffy Jackson & The Time Jumpers, Jammin' to the
Beat the Blues at for the Mental Health Association of Tennessee, 17 avril
https://www.youtube.com/watch?v=WvM5qkK6JFA
2012. Duffy Jackson scatte, Nicolas Dary, Michel Pastre,
Jazz aux Sources, Châtel-Guyon, 27 mai
https://www.youtube.com/watch?v=fvkluRXvCj8
2012. Duffy Jackson and his Swingin' Big Band, Greg Diaz
(as), John Michalak/Tom Mitchell (ts), Mike Brignola (bar), Tom
Stancampiano/Dave Gibble/Nick Patsis (tp), Mike Egan/Drew Gardner (tb), Peter
Freudenberger (btb), Neil Bacher (g), Dolph Castellano (p), Dave Tomasello (b),
Lisanne Lyons (voc) «Splanky», «Count Spacey», «Critic's Choice», «I Just Found
Out About Love», Palm Beach Jazz Camp, FL, 14 juin
https://www.youtube.com/watch?v=a4Bl5BITPyw
https://www.youtube.com/watch?v=HrgMCJR_7X8
https://www.youtube.com/watch?v=wSLo8Ku-mK4
https://www.youtube.com/watch?v=exs9MveCnxI
2012. Duffy Jackson raconte Count Basie, sa vie... lors de
sa venue pour les 90 ans de Pauly Cohen (tp, 1922-2021), Fort Lauderdale, FL,
octobre, Jazz Video Guy
https://www.youtube.com/watch?v=XoCHTqQrp9c
2013. Duffy Jackson & the Georgia State Jazz Band,
«Shiny Stockings», Jazz Education Network, Atlanta, GA, 3 janvier, Jazz Video
Guy
https://www.youtube.com/watch?v=wSO4KLy6KGM
2013. Duffy Jackson Quintet, Nicolas Dary/Nicolas Montier
(s), Pierre Christophe (p), Raphael Dever (b), «Broadway», Hot Club du
Gâtinais, Montargis, 10 mars
https://www.youtube.com/watch?v=BMM2kycTJ-c
2014. Duffy Jackson Big Band & Jeff Steinberg, «Danny
Boy», Nashville Jazz Workshop, TN, 23
juillet
https://www.youtube.com/watch?v=mGHYDXBQYho
2018. Duffy Jackson with The King's Academy's Jazz
Ensemble, «Switch in Time», Palm Beach, FL, 6 avril
https://www.youtube.com/watch?v=Ca5c3aW-FP0
2018. Duffy Jackson, Ted Wilson (kb), Jerry Lackey (b), Drum
Lesson, Christ Lutheran Saturday Afternoon Jazz Jam, Nashville, TN
https://www.youtube.com/watch?v=BL5BzSjjaxg
2019. Duffy Jackson Quintet, «I Can't Give You Anything but
Love», Live at Acme Feed & Seed, Nashville, TN, 30 octobre
https://www.youtube.com/watch?v=rnEUc7ulSI0
2021. Duffy Jackson Memorial Tribute, rétrospective, musique
(aussi à la basse, au scat) et paroles, Duffy, Nashville Jazz Workshop, TN
https://www.youtube.com/watch?v=btFV2Ugv1po
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