Art Pepper
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28 août 2013
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The Quintessence. Los Angeles 1950-1960
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© Jazz Hot n°664, été 2013
Réédition-Indispensable
Titres et personnels communiqués dans le livret
Enregistré entre le 18 mai 1950 et le 29 février 1960, Hollywood et Los Angeles
Durée : 1h 10' + 1h 12' 11''
Frémeaux & Associés 288 (Socadisc)
Consigner dix ans de vie discographique en deux CDs, quand de surcroît il s’agit de celle de l’altiste Arthur Edward dit Art Pepper (1925-1982), tiendrait de l’absolue gageure n’étaient les réelles qualités de discernement de l’indispensable Alain Gerber, patron de la non moins indispensable collection « The Quintessence ». En effet, tel le spécialiste du café malongo de la pub, celui-là parvient à trier brillamment l’excellent grain de l’à peine moins bon pour réussir le tour de force de nous présenter les multiples facettes d’une living legend en devenir.
En 1950, et avec tout juste un quart de siècle d’existence à la clef, Art Pepper est déjà ce formidable musician’s musician incontournable des grands orchestres de la west coast. Shorty Rogers vient de lui offrir un thème – présent ici en plage d’ouverture – qui porte son nom et l’altiste a déjà un passif discographique appréciable. De Stan Kenton à Eddie Safranski et autres Dave Pell, de June Christy à Bab’s Gonzales, il a depuis 1943 – date de ses premiers enregistrements – creusé de glorieux sillons. Malgré deux années passées à l’ombre, ce n’est pas moins d’une cinquantaine d’albums qui sont mis à son actif dont plus d’une quinzaine, et non des moindres, sous son nom ou en collaboration avec toutes les pointures californiennes : Marty Paich, Chet Baker, Warne Marsh, Richie Kamuca, Bill Perkins pour ne citer que celles-là pendant la fastueuse décennie considérée.
Et c’est bien cette effervescence permanente comme l’émergence d’un style original, immédiatement identifiable, cet « art du déchirement » pour tout viatique et dont parle Alain Gerber que montre cette remarquable anthologie – une de plus chez F & A ! – au travers d’un parcours aussi riche qu’erratique du fantasque et fantastique altiste.
Du premier « Art Pepper » au dernier « Diane », thème dédié à sa première femme et issu de cette fameuse session où l’altiste Meets The Rythm Section, celle de Miles, c’est toute la construction d’une personnalité musicale hors du commun qui est mise en exergue avec pour point d’orgue cette fascination progressive pour le jazz de l’east coast, celui de l’urgence auquel le grand Art ne pouvait évidemment pas ne pas adhérer.
Magnifique double volume qui recèle en son sein de superbes joyaux comme ces deux plages avec le sextet du sous-estimé Joe Morello à la batterie, ou celle du corniste John Graas.
Si les oreilles d’amateurs avertis sauront apprécier ces morceaux choisis à leur juste valeur, il n’en reste pas moins vrai, qu’aujourd’hui, celles des plus jeunes restent ignorantes à y pointer le bout de leur nez et que les y convaincre reste, pour le coup, une mission qui, à défaut d’être très délicate, s’avère mal engagée.
Jean-Jacques Taïb
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