Roy Haynes, Festival Internazionale del Jazz della Spezia, Italie, 2010 © Umberto Germinale-Phocus
Roy HAYNES
Fountain of Youth
«Avant d’aller plus loin, je voudrais vous dire que c’est vraiment formidable d’avoir
une interview dans Jazz Hot, parce qu’en 1954, quand je jouais avec Sarah Vaughan,
votre magazine a mis ma photo en couverture d’un numéro. C’était la première fois
que je faisais la couverture d’un magazine. Je l’ai toujours, depuis 1954, ça fait un sacré bail!...»
(Roy Haynes, Jazz Hot n°533, 1996)
Roy Owen Haynes est né le 13 mars 1925 (ou 1926 d'après le New Grove Dictionary of Jazz), l'avant-dernier d'une fratrie de quatre garçons. Son père, Gus Haynes, travaille à la Standard Oil et chante dans une chorale; il lui transmet le goût de se bricoler des voitures de course d'enfant, et plus grand, celui des belles autos et des vêtements classieux qu'il gardera toute sa vie. La famille arrivée de la Paroisse St. John à la Barbade n'est pas riche, mais à force de travail, elle réussit à acheter sa maison à Roxbury, au sud de Boston, un quartier-Tour de Babel où Roy fraie avec des apprentis-artistes ambitionnant la scène de Broadway; c'est avec eux qu'il découvre les œuvres des Gershwin et autres grands pourvoyeurs de standards, aussi bien pour les musicals de la 42e Rue que pour le jazz dans la 52e Rue!
Roy Haynes, en plus de ses talents de batteur et de percussionniste, était aussi un chanteur, un showman et un conteur...
«... Ma maison était juste en face de la synagogue. J’avais pour mission d’allumer
les lumières le samedi matin et de les éteindre le vendredi soir pour les Juifs du quartier.
Et je venais charger leur poêle à charbon, s’ils en avaient besoin. Ce qui était formidable,
c’était de vivre avec des Irlandais, des Canadiens français; on se croyait aux Nations Unies.
J’allais à l’école Roxbury Memorial. On la surnommait la «Synagogue». Le quartier était splendide;
tout le monde était pauvre, mais la ségrégation n’existait pas. La maison appartenait à mon père,
qui venait de La Barbade. Il avait épousé ma mère là-bas alors qu’elle était très jeune.
Leur premier fils, Douglas, y est né... Il a été roadie pour l’orchestre de Blanche Calloway,
et il connaissait Dizzy, Clark Terry… enfin, tout le monde. Mes autres frères,
Vincent et Mike, sont respectivement écrivain et prêtre de l’Eglise baptiste...»
(Roy Haynes, Jazz Hot n°533, 1996)
Le jeune Roy se fait finalement expulser de Roxbury Memorial car ses shows de batterie en classe avec les baguettes de Douglas détournent l’attention de ses camarades; ce renvoi l'arrange car il se produit déjà en concerts le week-end dans son quartier ou dans le centre de Boston, ce qui sera sa véritable école où il apprend d'oreille tout ce qu'il doit savoir pour devenir un batteur d'excellence, soutenu par sa mère, Edna Gertrude Payne-Haynes qui l'a incité à apprendre la musique depuis l'enfance en lui achetant un violon vendu avec dix leçons collectives ou en le faisant jouer à l'Eglise pentecôtiste, même s'il déteste ça. Edna, une des mères-courage du jazz, ne rechignant pas aux travaux ménagers pour développer les talents de ses enfants, même jazzmen en herbe! Aussi, lorsqu'il commence à travailler la semaine en trio jazz avec une simple caisse claire pour accompagner des danseurs et chanteurs du North End italien de Boston, il s'achète progressivement toutes les pièces d'une batterie complète, mais il donne aussi à sa mère l'argent nécessaire pour la famille. Pieuse, elle lui interdit de passer les disques de Billie Holiday, Count Basie, Benny Goodman ou de jouer de la batterie le dimanche, même s'il s'exonère déjà des séances de prêches torrides! Son frère aîné va à cette époque à New York le week-end et lui raconte le Savoy Ballroom, Chick Webb, Jo Jones, le «Papa Jo» des batteurs, qu'il connaît et que Roy a vu avec Count Basie au RKO Theater en 1940: il écoute activement ses disques, ceux de Chick Webb, Cozy Cole, Louis Jordan, Charlie Christian, Erskine Hawkins, Billy Eckstine, Sid Catlett entre autres; c'est un boulimique du son, instrumental, vocal ou rythmique, élaborant dès son enfance sa propre palette de couleurs. A 17 ans, il a enfin l'opportunité de rencontrer Shadow Wilson, Kenny Clarke, Art Blakey dans les jam sessions du dimanche au Ken Club où il côtoie George Wein (cf. Tears 2021*), son cadet de sept mois, qui s'entraîne au piano avant son départ à la guerre en Europe; Roy sera un des familiers du Storyville, le club de George Wein à Boston, côtoyant et enregistrant avec Ruby Braff (cnt), George Brunies (tb,voc), Al Drootin (cl), John Field (b) en 1952, avant même d'être un régulier du Newport Jazz Festival. Pour l'heure, Roy est adopté musicalement par Art Blakey venu avec Fletcher Henderson en tournée mais qui décide de rester la majeure partie de l'année 1944 à Boston, une autre terre fertile du jazz. Au Tic Toc, Roy admire Fats Waller et Louis Armstrong avec lequel il jouera une semaine en 1946 lors d'une tournée en Caroline du Nord dans les ballrooms.
Roy Haynes, Vienne, 1988 © Pascal Kober
Roy Haynes démarre par l'école du swing avec sa règle d'or inflexible: «garder le tempo» pour tout l'orchestre et ainsi mettre le feu entre musiciens, danseurs et public qui retrouvent un sens, une confiance dans une humanité collective après trente ans de traumatismes planétaires: garder le tempo est une responsabilité importante qui impose une discipline endurante acquise par un travail sans relâche.
A partir de 1944, Roy qui a réussi à éviter les guerres (la Seconde et celle de Corée) avec un ulcère diplomatique, travaille pour les orchestres de Sabby Lewis, Phil Edmond, Pete Brown, Frank Newton, puis il part à New York début septembre 1945 sur l'invitation du Panaméen Luis Russell pour jouer en big band au Savoy Ballroom, à l'Apollo, à l'Earle Theater de Philadelphie, à Baltimore, Chicago, Detroit et Washington, jusqu'en 1947. C'est également avec Luis qu'il gravera son premier album en sideman (cf. vidéographie); après avoir squatté le salon familial de son leader, il vit à Sugar Hill, NY, dans des petits hôtels, et fréquente avec acharnement les clubs, de Harlem à la Swing Street (52e Rue) ou Greenwich, car il peut y rencontrer Sidney Bechet, Don Byas, Coleman Hawkins avec lequel il enregistrera dès 1952.

Roy Haynes, Vienne, 1988 © Pascal Kober
Au niveau atmosphère, il préfère les lundis soirs du Minton's, comme Lou Donaldson (cf. Tears 2024*), le Sugar Ray's où le célébrissime boxeur-danseur à la Cadillac rose, Ray Robinson, reçoit ses amis vedettes, de Gene Kelly à Nat King Cole, Frank Sinatra ou Lena Horne (cf. Le Village de Max Gordon, Jazz Hot 2025*). Roy tombe amoureux de la poésie d'Harlem, de ses arts florissants, de sa liberté, de son esprit solidaire entre musiciens, entre batteurs, Max Roach, Kenny Clarke, Art Blakey (chez Billy Eckstine) qui fait vibrer le Sudan (ex-Cotton Club) rempli de danseurs, Joe Harris, Teddy Stewart (chez Dizzy Gillespie); Harlem où il déambule au petit matin entre James Baldwin et Max Roach qui parlent de la diffusion volontaire de la drogue dans leur communauté pour affaiblir et enliser le combat des Afro-Américains pour la justice et les emplois, et refont le monde.
Il part en tournée dans le Sud mais y voit un racisme brutal, insupportable. Révolté, il rentre à New York, reprend le Savoy et le Royal Roost où il rencontre Ray Brown et Ella Fitzgerald en 1948, et est engagé par Lester Young en petite formation avec Sadik Hakim (p, aka Argonne Dense Thornton), Shorty McConnell (tp), Ted Briscoe (b) de 1947 à 1949. Ils enregistrent et accompagnent une première fois Sarah Vaughan (One Night Stand, Blue Note 1947). Avec Prez, Roy part en Californie mais quand il est en congés, il fait des remplacements notamment chez Count Basie. Il joue avec Babs Gonzales de 1947 à 1960, lequel le présente dès 1949 à J.J. Johnson et Sonny Rollins avec lequel il aura une conversation musicale gravée de plus de six décennies! Entre 1948 et 1950, il démarre plusieurs collaborations avec Milt Jackson, Harry Belafonte, Nat King Cole, Brew Moore, Al Haig, Wardell Gray, Stan Getz, Miles Davis ou Kai Winding (jusqu'en 1982) parmi de nombreux autres artistes. Il suit attentivement Bud Powell de 1949 à 1953 entre concerts, enregistrements du leader ou ensemble en sidemen pour Charlie Parker, attristé par les épisodes d'hospitalisation de cet autre génie des touches d’ivoire. A l'été 1950, Roy prend le pupitre de Max Roach chez Charlie Parker en compagnie de Red Rodney, Al Haig, parfois Kenny Dorham, au Café Society de Greenwich alors en pleine chasse maccarthyste de son patron Barney Josephson (cf. Herbert Jacoby, Jazz et Politique, Jazz Hot 2025*). Mais Roy a des étoiles plein les mirettes: Art Tatum travaille en face; pendant les pauses, il va voir le maestro qui le subjugue; Billie Holiday passe chanter avec leur groupe dans «son» club qu'elle avait ouvert en 1938 et où elle chante «Strange Fruit» début 1939! C’est un été en état de grâce pour le jeune batteur. Devant le Café Society, son cabriolet Oldsmobile décapotable argenté épate Chan Parker, Roy n'a que 25 ans, cette voiture est son premier gros investissement, signe de sa réussite naissante, il est surnommé snap crakle!
A partir de fin août 1950, Roy fait ainsi partie du projet Bird With Strings qui se produit à l'Apollo, au Birdland pour son ouverture en décembre 1949 (puis août 1950, mars-avril 1951, août 1954), au Carnegie Hall avec Candido Camero (novembre 1952), la plupart des concerts sont radiodiffusés et donc disponibles en disques: du swing au bop, des violons aux rythmes effrénés de Cuba, Roy participe avec appétit à toutes les aventures qu'on lui propose. A cette époque, son frère Michael, pasteur baptiste, s'implique encore davantage dans le combat des droits civiques avec Martin Luther King Jr., devenant même un élu du Massachusetts pour le Mouvement.
Charlie Parker et Bud Powell vont donner à Roy l'opportunité de jouer avec Dizzy Gillespie (1951), Charles Mingus, Thelonious Monk avec lequel il gravera plusieurs albums à partir de 1958. A l'été 1952, il tourne avec Ella Fitzgerald et Hank Jones, il n’est plus en rodage! Si l'on veut prendre la mesure de la réelle frénésie de Roy Haynes, il suffit de consulter sa discographie avec quatre-vingts sessions avant son premier disque en leader entre 1945 et 1954, et quatre-cents sessions en 67 ans, un dictionnaire des talents du jazz en temps réel.
Chick Corea, Christian McBride, Roy Haynes, Jazz à Juan, 2006 © Umberto Germinale-Phocus
Avec Sarah Vaughan, ils vont enregistrer vingt-deux albums entre fin 1947 et début 1958, dans les configurations les plus prestigieuses dont les formations de Lester Young, Charlie Parker, Stan Getz, Ernie Wilkins, Count Basie, Clifford Brown, Thad Jones, le JATP, pour Blue Note, et aussi au sein du trio de la chanteuse entre 1953 et 1957. En 1954, ils partent en Europe où Roy grave ses trois premiers albums en leader, selon l’adage «nul n’est prophète en son pays», dont Busman's Holiday à Stockholm ou Modern Group à Paris pour Swing/Vogue, côtoyant les jazzmen de l'autre rive du hot, dont Barney Wilen, Maurice Meunier (ts), Jay Cameron (bar), Roger Guérin (tp), Henri Renaud, René Urtreger, Bob Dorough, Martial Solal (p), Jimmy Gourley (g), Jean-Marie Ingrand, Buddy Banks (b); ce sont quatre semaines intenses en enregistrements dont deux avec le JATP à Copenhague comprenant Mary Lou Williams, Jimmy Jones (p), Sarah Vaughan (voc), Joe Benjamin, Al Lucas (b), et quatre autres disques en leaders pour Buddy Banks, Jimmy Jones, Henri Renaud et Martial Solal, soit neuf albums en un mois sans compter les concerts!
Au retour, il reprend ses participations ponctuelles chez Count Basie, avec Red Rodney (tp,vcl), Ira Sullivan (tp,ts,as), Norman Simmons (p), Victor Sproles (b) pour Modern Music From Chicago (Fantasy), Introducing Nat Adderley (cnt) avec Cannonball Adderley (as), Horace Silver (p), Paul Chambers (b) (EmArcy), pour Jimmy Jones (p) avec Joe Puma, Jimmy Raney (g), George Duvivier/Richard Davis (b), grave The Sound of Sonny de Sonny Rollins avec Sonny Clark (p) et Percy Heath/Paul Chambers, et continue à accompagner des chanteurs dont Jackie Paris.
Quand Roy quitte Sarah Vaughan début 1958, il a acheté sa maison de famille à Hollis (dans le Queens sur Long Island), il est marié avec Jesse Lee Nevels, la femme de sa vie jusqu'à son décès en 1979, et devient père de son premier fils Graham, futur cornettiste avec lequel il fera son dernier Village Vanguard. Roy est prêt à construire ses propres formations, voler de ses ailes pour agrandir sa famille: Leslie, sa fille, naîtra en 1959 et Craig, qui jouera avec Sun Ra Arkestra ou Freddie Hubbard, complète la famille en 1965.
Miroslav Vitous et Roy Haynes, Festival Internazionale del Jazz della Spezia, Italie, 2010 © Umberto Germinale-Phocus
1958 est marquée par ses collaborations avec Art Farmer (tp), lors du concert de Thelonious Monk à Newport avec Henry Grimes (b), ou en quintet aux côtés de Johnny Griffin, John Coltrane, Charlie Rouse (ts) et Ahmed Abdul-Malik (b) au Five Spot de New York; puis Roy fait partie du Drums Around the Corner d’Art Blakey, avec Lee Morgan (tp), Bobby Timmons (p), Jymie Merritt (b), Philly Joe Jones (dm,perc), Ray Barretto (cga) chez Blue Note, grave un quatrième disque, We Three, en coleader avec Phineas Newborn, Jr. (p) et Paul Chambers (b). Il clôture avec George Shearing (p), Warren Chiasson (vib), Toots Thielemans (g,hca), Carl Pruitt (b), Armando Peraza (cga) pour Latin Affair chez Capitol. La triste année 1959, il retravaille une seconde fois avec Billie Holiday accompagnée par le magnifique pianiste Mal Waldron à Boston, fin avril, un mois après le décès de Lester Young, l’ami de la chanteuse et le second leader du batteur; en mai, Sidney Bechet disparait en France où il résidait, et deux mois plus tard, Billie décède en juillet, elle a 44 ans. Après le décès de Charlie Parker (1955), celui de John Coltrane (1967), Roy honorera ces trois artistes régulièrement dans des hommages en concerts et/ou albums comme la série des Charlie Parker Tenth Memorial Concerts au Carnegie Hall le 27 mars 1965 avec Roy Eldridge, Howard McGhee, Kenny Dorham, Dizzy Gillespie, Howard McGhee (tp), J.J. Johnson (btb, aka C.C. Siegel), Bennie Green (tb), Coleman Hawkins (ts), Sonny Stitt, Lee Konitz (as), Billy Taylor, Walter Bishop, Jr. (p), Tommy Potter (b), Dave Lambert (voc): la mémoire, les spirits font partie intégrante de la vie et du processus de création artistique.
«... la mélodie est essentielle, même si on ne la joue pas. Je connais des musiciens actuels
qui ne savent pas quelles sont les notes justes, et on y perd : il manque quelque chose.
Ceux que je préfère écouter, ce sont Art Tatum, Coleman Hawkins, Bird, Coltrane.
Je les aime tous ; je me sens bien quand je les écoute...»
(Roy Haynes, Jazz Hot n°533, 1996)
De rencontres en retrouvailles, de concerts en disques ou en festivals, Roy écume les clubs, les pays, la planète, cherchant son chemin avec toutes les générations passées et en devenir; voici un très bref rappel chronologique pour illustrer son luxuriant parcours artistique: • 1959: Phil Woods, Sonny Stitt, Lee Konitz, Kenny Burrell, Randy Weston • 1960: Oliver Nelson, Eric Dolphy, Booker Little, Wynton Kelly, Tommy Flanagan, Etta Jones, Eddie Lockjaw Davis, Clark Terry, J.J. Johnson, Ray Charles • 1961: Jaki Byard, Shirley Scott, Ted Curson • 1962: Rahsaan Roland Kirk • 1963: Frank Strozier, Jackie McLean, Grachan Moncur III, Bobby Hutcherson, Andrew Hill, Joe Henderson • 1964: Jimmy Witherspoon, Charles Lloyd, Charles Tolliver • 1965: Dave Lambert, Billy Taylor, Harold Mabern • 1966: Gary Burton • 1967: John Hicks • 1968: Archie Shepp, Chick Corea, Jack DeJohnette, Bennie Maupin, Stanley Cowell, Miroslav Vitous • 1969: Julian Priester, Clifford Jordan, Pharoah Sanders, James Spaulding, Lonnie Liston Smith, Leon Thomas • 1970: Von Freeman, Jodie Christian, Rufus Reid • 1971: Larry Coryell, Gato Barbieri, John Abercrombie, Stanley Clarke, Airto Moreira, Mtume • 1972: Jimmy Smith, Joe Newman, Illinois Jacquet, Zoot Sims, Kenny Burrell, B.B. King, Joe Newman, James Moody, Gerry Mulligan • 1973: Hampton Hawes, Sir Roland Hanna, Sam Jones, Jimmy Owens, Herbie Mann, David Fathead Newman, Roy Ayers, George Benson, Eddie Henderson, Curtis Fuller, Carter Jefferson, Cedar Walton, Mickey Bass, Ray Mantilla, Kenny Barron • 1974: Anthony Braxton, Dave Brubeck, Jack Six • 1975: Jimmy Heath, Barry Harris • 1976: Mary Lou Williams, Ron Carter, Hilton Ruiz, Warne Marsh, Sal Mosca, Duke Jordan • 1977: George Cables, Milcho Leviev, Kenneth Nash, Marcus Fiorillo, Nick Brignola, Pepper Adams, Derek Smith, Dave Holland • 1978: Tiger Okoshi , Steve Swallow, Dizzy Reece, Charles Davis, Albert Dailey, Art Davis, Claude Williamson, Alice Coltrane, Marion Brown, Ricardo Strobert, Dave Jackson, Sadao Watanabe, Red Garland, Hank Jones, Bob Ojeda, Teddy Edwards, Walter Bishop, Jr., Sal Nistico, Ronnie Mathews, Pat Patrick, Harold Land, John Heard, Joe Farrell, John Klemmer, Art Pepper • 1979: Ray Drummond, Joe Albany, Horace Tapscott • 1980: Michal Urbaniak, Ted Dunbar, Buster Williams • 1981: Gary Peacock • 1982: Kevin Eubanks • 1983: Freddie Hubbard, Lew Tabackin, JoAnne Brackeen, Eddie Gomez • 1984: Chick Corea, Miroslav Vitous • 1986: Ralph Moore, David Kikoski, Makoto Ozone, George Mraz • 1987: McCoy Tyner, Pharoah Sanders, Cecil McBee, David Murray, Michel Petrucciani • 1988: Billy Pierce, Mark Isaacs • 1989: Don Sickler, Cecil Payne, Brian Lynch, Terence Blanchard, Frank Lacy, Donald Harrison, Javon Jackson, Benny Golson, Geoff Keezer, Walter Davis, Jr., Essiet Essiet, Michele Hendricks, Pat Metheny • 1990: Graham Haynes, Craig Handy, Harry Whitaker, Barry Finnerty, Spaceman Patterson, Marcus Miller • 1991: Marcus Belgrave, Kirk Lightsey, Santi Debriano, Ali Ryerson • 1992: Ed Howard • 1994: Christian McBride, Charlie Haden, Tomas Franck, Thomas Clausen, Niels-Henning Orsted Pedersen • 1995: Wallace Roney, Ravi Coltrane, Lionel Hampton, Kuni Mikami, Roberta Piket, Stephane Grappelli • 1997: Kenny Garrett, Joshua Redman • 1998, Danilo Perez, John Patitucci • 1999: Graham Haynes, David Sanchez, Dwayne Burno • 2001: Roy Hargrove • 2002: John Scofield, Marcus Strickland, Martin Bejerano, John Sullivan • 2006: Jaleel Shaw, Robert Rodriguez • 2010: Ornette Coleman, Sonny Rollins • 2011: David Wong
Joshua Redman, Christian McBride, Roy Haynes, Paris 1996 © Christian Ducasse
Les disparitions de Kenny Clarke, Jo Jones et Philly Joe Jones en 1985, puis d’Art Blakey en 1990, d’Elvin Jones en 2004, de Max Roach en 2007, et de Tootie Heath le 3 avril 2024 dernier, parmi de nombreux autres batteurs mythiques nés avant le second conflit mondial, nous parlent d’une époque où le collectif était aussi bien la clé de l’effervescence artistique populaire que celle de l’émancipation humaniste: sans doute les deux sont-elles indissociables car en dynamique. En effet, lorsqu’on prend le recul et la mesure comparative avec notre XXIe siècle, systémique, asséché, pauvre, robotisé, frustré de vie telle une peau de chagrin, on perçoit d’autant mieux la chaleur du feu et de l’énergie portés par les disques et les images du jazz cooking tel que vécu et pratiqué par Roy Haynes, un splendide patrimoine commun qui nous renvoie encore l’écho de cette époque alternative pourvoyeuse de liberté.
La production musicale de Roy Haynes sera plusieurs fois récompensée notamment comme NEA Jazz Master en 1995, par deux Grammies pour l’album avec McCoy Tyner, Blues for Coltrane en 1989, puis pour celui avec Gary Burton, Chick Corea, Pat Metheny, Dave Holland, Like Minds en 2000, et par la Jazz Foundation of America en 2019 pour l’ensemble de son œuvre. Cette année-là en juin, il joue encore en quartet au Blue Note de New York (cf. vidéographie) avec Jaleel Shaw (s), Martin Bejerano (kb), David Wong (b). Ensuite, Roy Haynes se retire dans sa maison, le grand âge, le manque de chaleur humaine de la période d'isolement covid (2020-2022) combiné aux décès nombreux parmi les jazzmen n'étaient plus favorables à des apparitions en public. Roy Haynes, Festival Internazionale del Jazz della Spezia, Italie, 2010 © Umberto Germinale-Phocus
Roy Haynes s’est éteint à 99 ans, entouré des siens, dans sa seconde maison achetée après le décès de Jesse Lee dans la ville de Baldwin (Comté de Nassau, toujours sur Long Island, NY), non loin de la première où sa famille réside. Il laisse dans le deuil ses trois enfants, Graham, Leslie et Craig, des petits-enfants dont le batteur Marcus Gilmore, et des arrière-petits-enfants.
La rédaction de Jazz Hot leur présente ses sincères condoléances.
Hélène Sportis, Jérôme Partage, Yves Sportis
Photos Umberto Germinale-Phocus, Pascal Kober, Christian Ducasse
Image extraite de YouTube
Avec nos remerciements
SOURCES
Roy Haynes, NEA Jazz Masters 1995, Interview de Josephine Reed, 3/7/2014:
ROY HAYNES & JAZZ HOT
(hors chroniques et annonces de concerts)
• Jazz Hot n°69, Septembre 1952, photo avec Charlie Parker et Miles Davis • Jazz Hot n°93, Novembre 1954, Couverture: Roy Haynes • Jazz Hot n°94, Décembre 1954, photo dans les studios d'enregistrement à Paris (Vogue) • Jazz Hot n°96, Février 1955, photo pleine page • Jazz Hot n°137, Novembre 1958, photo Roy Haynes/Thelonious Monk/Johnny Griffin (Five Spot) • Jazz Hot n°162, Février 1961, Jazz Actualités: Roy Haynes/Sonny Rollins • Jazz Hot n°175, Avril 1962, Roy Haynes par Demètre Ioakimidis, photo pleine page, photos (avec Sarah Vaughan) • Jazz Hot n°225, Novembre 1966, photo avec Stan Getz "Au-delà du cool" • Jazz Hot n°261, Mai 1970, Brève: Roy Haynes Hip Ensemble au Japon • Jazz Hot n°289, Décembre 1972, Newport à Paris à l'Olympia: Elvin Jones Quartet + Drum contest avec Art Blakey et Roy Haynes; James Moody/Illinois Jacquet/Kenny Burrell/Roy Haynes; photo • Jazz Hot n°401, Juin 1983, Comptes rendus: Roy Haynes/Kevin Eubanks au Petit Forum • Jazz Hot n°452, Mai 1988, Comptes rendus: Roy Haynes à Albi Jazz • Jazz Hot n°469, Décembre 1989, Comptes rendus: Roy Haynes à Leverkusen • Jazz Hot n°509, Avril 1994, Comptes rendus: Roy Haynes au New Morning • Jazz Hot n°533, Septembre 1996, Couverture: Roy Haynes; Magazine: Roy Haynes: Once upon a time par Leslie Gourse-trad. Catherine Henry (discographie sélective=> 1994) • Jazz Hot n° Spécial 1997, Année 1997, Album Photos’96 • Jazz Hot n°542, Juillet-Août 1997, Comptes rendus: Roy Haynes à Jazz sous les Pommiers-Coutances • Jazz Hot n°544, Octobre 1997, Comptes rendus: Roy Haynes/David Kikoski/Donald Harrison au Nice Jazz Festival • Jazz Hot n°560, Mai 1999, Comptes rendus: Roy Haynes au Printemps du Jazz-Nîmes • Jazz Hot n°573, Septembre 2000, Comptes rendus: Roy Haynes à Jazz à La Villette • Jazz Hot n°574, Octobre 2000, Comptes rendus: Roy Haynes Trio à Vitoria Jazz • Jazz Hot n°580, Mai 2001, Comptes rendus: Roy Haynes à Blues Autour du Zinc-Beauvais • Jazz Hot n°593, Septembre 2002, Comptes rendus: Roy Haynes/Kenny Garrett/Christian McBride/Nicholas Payton/ David Kikoski à Jazz à Vienne • Jazz Hot n°606, Décembre 2003-Janvier 2004, Comptes rendus: Roy Haynes/Marcus Strickland/Martin Balejano au Sunside • Jazz Hot n°621, Juin 2005, Comptes rendus: Roy Haynes au New Morning • Jazz Hot n°623, Septembre 2005, Comptes rendus: Roy Haynes au Festival d'Estoril • Jazz Hot n°626, Décembre 2005-Janvier 2006, Comptes rendus: Roy Haynes au Paris JVC Jazz • Jazz Hot n°639, Mai 2007, Comptes rendus: Roy Haynes Fountain of Youth Quartet au Cabaret de Monte-Carlo • Jazz Hot n°646, Juin 2008, Hot News: Roy Haynes • Jazz Hot n°650, Novembre 2009, Comptes rendus: Roy Haynes/David Kikoski à Pescara Jazz Jazz Hot n°651, Printemps 2010: • Compte rendu: Roy Haynes Fountain of Youth à Marciac • Jazz Live!-Movies: 2 DVDs Charlie Parker, Improvisation • Jazz Hot n°652, Eté 2010, Comptes rendus: Roy Haynes/Jaleel Shaw au Duc des Lombards • Jazz Hot n°653, Automne 2010, Roy Haynes/Jaleel Shaw au Ronnie Scott’s • Jazz Hot n°664, Été 2013, Roy Haynes au Ronnie Scott’s • Jazz Hot 2020, Hot News 13 mars 2020: Happy 95'Swing Mr. Haynes!
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