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Jackie Williams

11 juin 2023
3 janvier 1933, New York, NY - 11 juin 2023, New York, NY
© Jazz Hot 2023

Jackie Williams, 96th Street Library, New York, NY, février 2020, image extraite de YouTube
Jackie Williams, 96th Street Library, New York, NY, février 2020, image extraite de YouTube

Jackie WILLIAMS

Harlem Spirit


Le batteur Jackie Williams a accompagné de son drumming subtil au swing étincelant de nombreuses légendes du jazz parmi lesquelles Buck Clayton, Vic Dickenson, Earl Hines, Dizzy Gillespie, Teddy Wilson, Roy Eldridge, Illinois Jacquet, Clark Terry, Joe Williams, Erroll Garner, Slam Stewart, Stéphane Grappelli, Doc Cheatham, Jay McShann, Maxine Sullivan, Junior Mance. Musicien d’une grande modestie et d'une gentillesse unanimement appréciée, il a laissé peu d’éléments permettant de détailler sa biographie, mais ses multiples et prestigieuses collaborations, son impressionnante discographie en sideman qui l'a vu côtoyer ce que le jazz a de meilleur, alors qu’il n’a jamais franchi les portes des studios pour son compte, et ses nombreuses participations à des tournées all-stars en faisaient un personnage familier du Harlem des arts et un artiste apprécié des amateurs de jazz. Il est parti, tout aussi discrètement qu'il avait vécu, le 11 juin 2023, à l'âge de 90 ans, en ayant apporté sans ostentation une contribution essentielle à l'art majeur du XXe siècle, en artiste de jazz.


Dès son plus jeune âge, Jackie Arthur Williams est fasciné par la musique qu’il entend à la radio ou dans les rues de Harlem. Il prend quelques leçons de piano puis, entre 16 et 18 ans, il fréquente une école de musique où son professeur, Aubrey Brooks, lui donne les premiers rudiments de batterie et de théorie musicale. Au lycée, dont il intègre l’orchestre, il étudie la musique et les arts plastiques. Ses modèles sont alors Sonny Greer, Jo Jones, Max Roach, Roy Haynes. Il obtient ses premiers engagements dans son voisinage quand s’organisent des parties dansantes où l’on joue du jazz, du mambo ou du calypso et travaille avec différents orchestres.

Il effectue sa première collaboration d'importance avec Buck Clayton à partir de la fin des années 1950 et sa première session studio avec le trio du pianiste Eugene Smith (Groovin' at The Embers, 1959, Gone Records). Il participe à l’été 1961, puis ponctuellement, de 1963 à 1966, au groupe The Saints and Sinners de Red Richards (p) et Vic Dickenson (tb) (The Saints and Sinners, 1964-65, 77 Records). Le batteur restera d’ailleurs fidèle au tromboniste qu’il retrouvera sur Bobby Hackett and Vic Dickenson at the Royal Box (1971, Hyannisport), In Session (1974, Jazzways) et Plays Bessie Smith: Trombone Cholly (1976, Sonet). Entre 1961 et 1963, il dirige son propre trio avec Edmond Hall (cl) qui fut membre (1940-1948) des orchestres maison des clubs Café Society Uptown et Downtown de Barney Josephson, hauts-lieux de l’anti-ségrégationnisme jusqu'à leur fermeture définitive en 1950 du fait de la répression maccarthyste. En septembre 1961, Jackie Williams joue avec un autre clarinettiste et vétéran de la Swing Era, Buster Bailey. A l’automne 1966, il se produit au Mark Twain’s Riverboat Restaurant (Empire State Building) avec Earl Hines pour un de ses rares engagements en big band, suivi d’une tournée en quartet. Il termine la décennie 1960 comme sideman de Teddy Wilson, Roy Eldridge, Eddie Condon, Illinois Jacquet, Clark Terry ou encore Odetta (voc,g).

En 1973, Jackie Williams enregistre aux côtés d’Erroll Garner (Magician, London Records) ainsi qu’un premier album avec Buddy Tate (ts), The Count's Men (RCA), qui sera suivi de The Texas Twister (1975, Master Jazz Records) et The Great Buddy Tate (1981, Concord Jazz). En 1974, il participe, à New York, à une session dirigée par Hugues Panassié, quelques mois avant sa mort, qui réunit les guitaristes Al Casey et Billy Butler (Guitar Odyssey, Jazz Odyssey). En mars 1975, il est en tournée à Paris, et il enregistre plusieurs albums pour Black & Blue avec ses partenaires: China Boy de Jimmy Shirley (g), Walla Walla de Johnny Guarnieri (p), I Ain't Got Nobody de Pat Flowers (p), Fish Scales de Slam Stewart (b). Tous se retrouvent sur Steff and Slam avec Stéphane Grappelli.

En outre, Jackie Williams débute une autre association dans la durée avec un grand aîné du swing, Doc Cheatham (tp), aux côtés duquel il grave six disques, de l’album collectif Jazz of the Connecticut Traditional Jazz Club 12 (1976,
ConnTrad Jazz) à The Eighty-Seven Years of Doc Cheatham (1992, Columbia), et assure fréquemment les dimanches soirs au Sweet Basil de Greenwich Village
de 1980 à son décès en 1997. L'année suivante, il participe au tribute: Remember Doc Cheatham (Arbors Records) de Chuck Folds (b). En 1977, le batteur apparaît sur The Last of the Blue Devils (Atlantic) de Jay McShann qu’il accompagnera de nouveau au début des années 1980. En 1978, il est sur For Lady Day (Pablo) de Zoot Sims et joue à la Grande Parade du Jazz de Nice dans l’un des groupes de Jonah Jones (tp) avec Claude Gousset (tb), Guy Lafitte (ts), André Persiani (p) et Roland Lobligeois (b). En mai 1979, Jackie Williams participe à un memorial concert dédié à Bobby Hackett (cnt,tp), dans le cadre de la saison de concerts Highlights in Jazz à New York, qui réunit notamment Vic Dickenson, Jimmy McPartland (p), Benny Morton (tb), Norman Simmons (p) et le fils de Bobby Hackett, Ernie (dm).

1997. The Floating Jazz Festival Trio, Chiatoscuro


Au milieu des années 1980, Jackie Williams est aux côtés de Maxine Sullivan (voc) –un des grands souvenirs de sa vie– sur trois disques: deux sur Stash, The Great Songs From the Cotton Club en 1984, Sings the Music of Burton Lane en 1985 et un sur Atlantic Together: Sings the Music of Jule Styne (1986). Début 1985, il fait partie du tout nouveau quintet d’Howard Alden (g) et Dan Barrett (cnt,tb) et enregistre en son sein Swing Street (1986, Concord), The A.B.Q. Salutes Buck Clayton (1989, Concord) et Live in '95 (1995, Arbors Records). Il est aussi dans l’octet d’Howard Alden pour Stricktly Instrumental (1987, Concord). Jackie Williams joue en outre avec Milt Hilton (b) (The Basement Tapes, 1989-90, Chiaroscuro), et Ralph Sutton (p) en compagnie duquel il se produit en duo au festival de Montauban en 1989. L’année suivante, il enregistre avec Al Grey (tb) Christmas Stockin' Stuffer (Capri).

Les années 1990 sont marquées par la participation régulière de Jackie Williams au trio de Junior Mance avec Keter Betts (b) –son groupe préféré, confie-t-il à Monk Rowe (cf. vidéographie)– qui gravera trois enregistrements studio dont deux chez Chiaroscuro, Blue Mande en 1994, Monk en 1996, Milestones (Sackville) en 1997, ainsi que des lives captés chaque année au cours des croisières du Floating Jazz Festival entre 1995 (avec Benny Golson) et 1998 (avec Etta Jones et Lou Donaldson).

En 2000, il est à l’affiche du North Sea Jazz Festival de La Haye avec un autre superbe trio, celui de Ray Bryant avec Ray Drummond (b). Son expérience et son swing séduisent également la jeune génération de musiciens comme Jon-Erik Kellso (tp), Nicki Parrott (b,voc) et Evan Christopher (Sidney Bechet Society, Jam Session Concert, Nagel-Heyer).

Billy Kaye (dm), Jackie Williams (dm), Jimmy Owens (tp), Local 802, JFA Monday Jam: l'occasion pour les musiciens de jouer, de se retrouver et de se raconter des anecdotes sur le «métier» (New York, NY, 2017) © Mathieu Perez
Billy Kaye (dm), Jackie Williams (dm), Jimmy Owens (tp), Local 802, JFA Monday Jam: 
l'occasion pour les musiciens de jouer, de se retrouver et de se raconter des anecdotes 
sur le «métier» (New York, NY, 2017) © Mathieu Perez

Dans les années 2000, Jackie Williams intègre les Statemen of Jazz, un all-stars monté en 1994 par Mat Domber, le patron d’Arbors Records, et apparaît dans le second opus enregistré par le groupe, sous la direction de Clark Terry, A Multitude of Stars (2003). Il fait également partie de la tournée qui passe par le Méridien à Paris en mai 2005 avec Warren Vaché (tp), Joe Wilder (tp), Wycliffe Gordon (tb), Houston Person (ts), Bucky Pizzarelli (g), Johnny Varro (p) et Bob Cranshaw (b) pour un programme autour de Duke Ellington (cf. compte-rendu dans Jazz Hot n°621). Durant la décennie 2010, le batteur était membre du Harlem Blues and Jazz Band, un orchestre créé en 1973 par Al Vollmer et Clyde Bernhardt (tb,voc), comptant notamment Ray Blue (ts) avec lequel il donnait, à la tête de son quartet, des concerts organisés par la Jazz Foundation of America, contribuant également dans ce cadre au travail de transmission vers les plus jeunes au travers du programme «Jazz in the schools». Ces dernières années, il avait cependant ralenti ses activités en raison de sa santé déclinante. Depuis la crise sanitaire de 2020-2021, Jackie Williams ne jouait plus que dans le groupe de Marc Devine (p).

Un hommage à la Saint Peter's Church de Manhattan, «l'église du jazz», lui a été rendu le 14 novembre par la communauté des musiciens qui a unanimement salué son extrême gentillesse. Jazz Hot adresse ses condoléances à sa famille, son neveu Al et l’ensemble de ses proches.

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Photo: Mathieu Perez
Images extraites de YouTube
Avec nos remerciements

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VIDÉOGRAPHIE

Jackie Williams interviewé par Monk Rowe en 1995, image extraite de YouTube
Jackie Williams interviewé par Monk Rowe en 1995, image extraite de YouTube


1995. Jackie Williams interviewé par Monk Rowe, Fillius Jazz Archive at Hamilton College, 18 octobre
https://www.youtube.com/watch?v=LJ2MMYfiReE


1997. Jackie Williams, Joe Temperley (bar, bs), Junior Mance (p), Keter Betts (b), International Jazzfestival Bern, Allemagne

https://www.youtube.com/watch?v=DXXgBx2Jdac


2013. Jackie Williams, Harlem Blues and Jazz Band: Willie Singleton (tp), Art Baron (tb), Ray Blue (ts), Bill Wurtzel (g), Reynold Zeke Mullins (p), Max Fleming (b) + guest Gunhild Carling, Ronneby Kulturcentrum, Suède, 2 juillet

https://www.youtube.com/watch?v=lHek5SR-lD4


2013. Jackie Williams, Harlem Blues and Jazz Band: Willie Singleton (tp), Art Baron (tb), Ray Blue (ts), Bill Wurtzel (g), Reynold Zeke Mullins (p), Max Fleming (b) + présentation Al Vollmer, Jazzens Museum, Strömsholm, Suède, 7 juillet

https://www.youtube.com/watch?v=i1_XM5iYQv4

https://www.youtube.com/watch?v=-FSGa63L7-E

https://www.youtube.com/watch?v=AONSj_KdsGw

https://www.youtube.com/watch?v=iJ1kUYlbUkw

https://www.youtube.com/watch?v=4hUa4pZ7f_M

https://www.youtube.com/watch?v=KRn1eto4rdo


2017. Jackie Williams, Marc Devine (p), Hide Tanaka (b), Cleopatra's Needle, New York, NY, 28 février

2019. Jackie Williams Quartet: Ray Blue (ts), Mitch Margold (p), Billy Johnson (b), Jazz Foundation of America, Pelham Fritz Recreation Center, New York, NY, 9 mai
https://www.youtube.com/watch?v=3myBoYZC5Gk

https://www.youtube.com/watch?v=_PuGpaAmyYc


2020. Jackie Williams Quartet, Jazz Foundation of America, 96th Street Library, New York, NY, 13 février

https://www.youtube.com/watch?v=9kkGzk7lWn0

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