La programmation du mois de mars était de toute beauté et a commencé à Ronnie Scott’s. Deux soirées avec Chick Corea et son groupe « The Vigil », composé de Marcus Gilmore (dm), Hadrien Feraud (b), Charles Altura (g) et Tim Garland (sax). Concerts complets ! Le public a adoré ! Les deux soirs suivants, complets aussi, le grand guitariste John Scofield jouait son groupe « Organic », avec Larry Goldings (synth) et Greg Hutchinson (dm). Aujourd’hui presque tous les concerts de chez Ronnie’s jouent à guichets fermés. Achetez bien vos places à l’avance. L’exaltation s’est poursuivie avec les deux concerts suivants, Courtney Pine et son « House of Legends », avec Robert Fordjour (dm), Cameron Pierre (g), Chris Cobbson (gtr), Darren Taylor (b) et Samuel Dubois (st-dm). Ils ont tout donné et les fans ont adoré ça. J’ai découvert un lieu que je ne connaissais pas, le KOKO à Camden Town, et un groupe que je ne connaissais pas non plus, Snarky Puppy. Ce groupe de jazz fusion, du Texas, a joué avec un large éventail d’instruments, sous la conduite du bassiste et compositeur Michael League. Retour à Ronnie’s pour trois soirées de musique latine explosive avec Tito Puente, Jr., le fils de la légende du mambo. Au Café Oto pour un soir, un petit club, l’excellent guitariste Marc Ribot, qui a énormément travaillé, surtout avec Tom Waits et John Zorn, a donné en solo une performance étonnante et intéressante qui lui a donné une rare occasion de toucher la perfection. Kenny Garrett, un autre maître, cette fois aux saxophones alto et soprano au Pizza Express, dont le jeu me donne toujours beaucoup de plaisir. Il est toujours aussi extraordinaire. J’ai eu la chance d’assister à deux concerts prévus le même soir au 606 Club. D’abord, celui du trio de Patrick Bettison (g), avec John Parricelli (gtr) et Nic France (dm), pour un set très soigné, suivi d’un concert passionné du pianiste Neil Angilley, avec Davide Mantovani (g) et Davide Giovanni (dm). Je ne savais pas grand-chose d’Angilley avant ce concert mais j’ai été très impressionné par son jeu et certaines de ses compositions. Pendant une seule mais inspirante soirée, Erik Truffaz, le trompettiste français né en Suisse, a joué avec son groupe habituel, Marcello Giuliani (b), Marc Erbeta (dm), Patrick Muller (synth) et Anna Aaron (voc). Comme vous le voyez, ce mois était riche de performances grisantes. Et la fin du mois fut encore supérieure avec, au Pizza Express, une musicienne dont je n’avais jamais entendu parler. La clarinette est mon instrument favori et il y a hélas de moins en moins de musiciens qui jouent encore. Quand j’ai entendu la clarinettiste israélienne Anat Cohen, j’ai été transporté par son jeu ! (Elle joue aussi du saxophone soprano et d’autres cuivres) Avec ce quartet au jeu intelligent, composé de Jason Lindner (p), Joe Martin (b) et Daniel Freedman (dm), j’ai passé une soirée exceptionnelle. A coup sûr, mon coup de cœur du mois de mars.
Antonio Forcione a lancé le mois d’avril à Ronnie Scott’s. Du côté de Queen Elizabeth Hall, j’ai découvert « Phronesis », un jeune groupe, original et attrayant, composé de Jasper Holby (b), Ivo Neame (p), et Anton Eger (dm), qui, dans le second set, a joué avec des invités tels que Jim Hart (vib), Dave Maric (synth) et Olivia Chaney (voc). De très belles soirées. Retour à Ronnie’s pour Pee Wee Ellis, passé maître dans l’art du tenor saxophone, venu avec un petit ensemble de musiciens dont un autre ténor, Josh Arcoleo. Georgie Fame, la légende de l’orgue Hammond, jouait au club avec son groupe, les fidèles Guy Barker (tp), Alan Skidmore (ts), Anthony Kerr (vib), Alec Dankworth (b), Tristan Powell (g) et James Powell (d), pendant une semaine. Son public, venu en nombre, était ravi. Au 606 Club, j’ai eu le plaisir d’entendre le jeune pianiste écossais Alan Benzie jouer pour la première fois avec son trio, Dylan Coleman (b) et Marton Juhasz (dm). Il ira loin. Mike Hobart, le critique de jazz du Financial Times, est aussi un joueur de saxophone ténor accompli. Il a ramené un bon quartet au Spice of Life. Je ne sais pas si quelqu’un est venu chroniquer le concert mais il méritait des superlatifs. Kurt Elling a rempli Ronnie Scott’s tout une semaine avec des chansons superbes. Ses fans ne pouvaient qu’être emballés. Le tout avec d’excellents musiciens, sous la conduite de Laurence Hobgood (p), John McLean (g), Clark Sommers (b) et Kendrick Scott (dm). La semaine suivante au club, durant trois soirs, le chanteur et bassiste américain Meshell Ndegeocello a réjoui son public pendant qu’au Pizza Express, un jeune saxophoniste norvégien sonnait mieux que lors de son dernier passage. Retour à Ronnie’s pour le pianiste cubain Chucho Valdes et ses « Afro Cuban Messengers », avec aussi comme invité Reinaldo Melian (tp). Chuco est une vraie légende. Durant trois soirs, on sentait que les spectateurs, venus très nombreux, avaient très envie de danser. Une autre légende, du saxophone cette fois, Charles Lloyd venu fêter son 75e anniversaire au Barbican. Le lineup était impeccable, Jason Moran (p), Greg Hutchinson (dm) et Reuben Rogers (b), rejoint plus tard par la chanteuse grecque Maria Farantouri. Une très belle soirée. Le très respecté saxophoniste britannique de free jazz Keith Tippett a donné un concert solo inhabituel au Café Oto. Il me disait qu’il écrivait beaucoup en ce moment. Une nouvelle qui fera plaisir à ses fans. Le mois s’est achevé avec bonheur à Ronnie Scott’s avec la charmante chanteuse et guitariste américaine Madeleine Peyroux qui a conquis le public pour trois soirées, composées de deux concerts distincts à chaque fois.
Enfin, le mois de mai. Premier arrêt à Ronnie’s pour une soirée avec la délicieuse China Moses, irrésistible, et son très bon groupe, Raphael Lemonnier (p), Luigi Grasso (as), Robert Meuniere (d) et Fabien Marcoz (dm). Suivie de trois concerts de l’excellent quartet américain Mike Stern/Bill Evans Band, avec Dave Weckl (dm) et Tom Kennedy (b). Ca balançait au Pizza Express avec le jeu musclé de Brian Culbertson. Je ne sais d’où vient son énergie. Un concert plus calme et plus posé au 606 Club avec Jeff Young (voc/g), accompagné de Frank Mead (sax), Geoff Dunn (dm) et Paul Carmicheal (b). Retour à Ronnie’s où les quatre groupes suivant ont joué deux soirs chacun. A commencer par Michel Camilo, le pianiste dominicain récompensé d’un Grammy Award, accompagné de Lincoln Goines (b) et Cliff Almond (dm). Et cette envie de danser palpable. Puis, le maître du vibraphone Gary Burton avec son « New Quartet », Julian Lage (g), Scott Colley (b) et Antonio Sanchez (dm), suivi du batteur légendaire Roy Haynes, qui fête ses 80 ans cette année, et son « Fountain of Youth », avec Jaleel Shaw (as), David Wong (b) et Martin Berjerano (p). Ouvrant son set par son jeu de claquettes habituel, Roy a démontré qu’il maîtrise toujours autant son jeu. Enfin, l’un des meilleurs jeunes pianistes d’Europe, Julian Joseph, avec Mark Hodgson (b) et Mark Mondesir (dm). Cette excellente formation joue ensemble depuis de nombreuses années. Le Pizza Express a eu la chance de programmer la chanteuse et compositrice Sheila Jordan qui, même à 84 ans, sonne superbement. Accompagnée de son fidèle bassiste Cameron Brown, il y avait aussi une autre chanteuse, Jay Clayton, et Jack Wilkins (g). Parfois, quatre grandes chanteuses, Liane Carroll, Ian Shaw, Natalie Williams et Brendan Reilly, se réunissent sous le nom « BLINQ » et jouent à Ronnie’s. Ce fut le cas pour un soir. Elles étaient merveilleusement accompagnées au piano par Gwilym Simcock. Sur le chemin du retour, je suis passé au 606 Club, qui fête son 25e anniversaire sur douze jours en invitant trois, quatre groupes à se produire chaque soir. Ce soir-là, tout le monde, y compris moi, voulait entendre l’un des meilleurs guitaristes au monde, Pat Martino. Personne n’a été déçu. Quand Ronnie Scott’s a annoncé la venue de Tom Harrell, trompettiste emblématique, pour deux soirs, les téléphones se sont mis à sonner furieusement et les concerts ont été complets immédiatement. Avec une carrière qui a commencé avec Stan Kenton et Woody Herman et qui se poursuit jusqu’à aujourd’hui, l’histoire de ce musicien est formidable, tout comme son jeu. Son quintet se compose de Wayne Escoffery (ts), Jonathan Blake (dm), Ugonna Okegwo (b) et Danny Grissett. De la dynamite. Plus tard dans la nuit, retrou au 606 Club pour trois chanteuses, Sarah Gillespie, qui est aussi guitariste, Tammy Weiss et la belle Gwyneth Herbert à l’ukulele, accompagnées de Sam Burgess (b). J’ai réussi à prendre une très bonne photo de Steve Rubie, le patron du club, qui donnait une excellente performance au saxophone alto. Ca a été le temps fort de ma soirée. Pour finir le mois, Monty Alexander était de passage à Ronnie’s, après deux ou trois ans d’absence, pour un seul soir. Les deux concerts, prévus la même soirée, étaient complets. Son trio se compose de son plus que fidèle contrebassiste Hassan Shakur et de Obed Calvaire (dm). En rentrant, je me suis arrêté au 606 Club pour attraper quelques-unes des célébrations pour leur 25e anniversaire et ai entendu Paul Carmichael Band, suivi d’un set de la chanteuse soul Imaani et son groupe. Je devais hélas partir alors que de la bonne musique était encore prévue au programme…
David Sinclair Crédits photos et légendes en passant le pointeur sur la photo
|