Al Mouzon, surtout connu pour son rôle majeur dans l’histoire de la batterie jazz fusion, à l’instar de Billy Cobham, était aussi le fondateur et propriétaire du label Tenacious Record, compositeur, arrangeur, producteur et acteur. Il descend en droite ligne d’une lignée mariant Africains, Français et Indiens Pieds-Noirs. Il reçoit sa première éducation musicale, délivrée par un batteur et un saxophoniste, à la Bonds-Wilson High School à Charleston, puis jeune diplômée il s’installe à New York. Il suit tout à la fois des études de musique, d’artiste dramatique (The Lee Strasberg Theatre & Film Institute) et de médecine. Son mentor pour la batterie est Bobby Thomas, le batteur du pianiste Bobby Taylor. Hésitant entre différentes carrières, il choisit la musique et joue en tant que percussionniste dans des «musicals» de Broadway, tel Promises, Promises.

Sa révélation auprès du grand public de jazz se fait au sein de Weather Report dont il est le premier batteur durant un an à partir de 1970 et il est présent sur le premier album éponyme en 1971. En 1972, il rejoint le pianiste McCoy Tyner et fait partie durant deux ans de son quartet, il enregistre quatre albums avec le groupe dont le saisissant Sahara. Entre 1970 et 1973, il est aussi batteur de studio, fort sollicité, et enregistre avec Gil Evans, Roy Ayers, Wayne Shorter, Tim Hardin, Les McCann, John Klemmer, Teruo Nakarama, Norman Connors. Il signe en 1973 son premier album paru chez Blue Note, The Essence of Mystery puis Funky Snakefoot.. C’est avec le Larry Coryell’s Eleventh House (1973-75) qu’il atteint la notoriété des grands batteurs de fusion et devient même l’alter ego du guitariste quand le groupe se reforme en 1977 pour l’enregistrement Back Together Again. Il signe ensuite plusieurs albums sous son nom, toujours pour Blue Note, dans lesquels sont invités Herbie Hancock, Lee Ritenour, Freddie Hubbard… Entre temps, il a enregistré en 1974 avec l’ex-guitariste de Billy Cobham, Tommy Bolin, l’album de fusion Mind Transplant.
 
En 1976, il rejoint, pour une brève et originale expérience, le tromboniste Albert Mangelsdorff et le bassiste Jaco Pastorius, dans un groupe intitulé «Trilogue» qui se produit notamment au Festival de Juan-les-Pins et au Berlin Jazz Days dont le concert a fait l’objet d’un album édité plus tard en 2005.

De 1975 à 1980, Il enregistre auprès de Robin Kenyatta, Al Di Meola, Donald Byrd, Roberta Flack, Bill Summers, Herbie Hancock (3 albums). Très apprécié en Allemagne, on le retrouve sur des albums de Joachim Kuhn, Rölf Kuhn, Jasper Van’t Hoff.

Durant les années 1980, il parcourt le monde en leader de ses propres groupes:
Alphonse Mouzon Band avec Jeff Daniels (key), Doug Norwine (ts), Wilton Ginte (elb); 

Alphonse Mouzon Quintet avec Chuck Manning (ts), David Enos (elb), David Goldblatt (key), Sal Marquez (tp);
Mouzon’s Electric Band avec Bob Malach (ts),Rex Robinson (elb), Robert Etoll (g).
Il produit plusieurs albums dont Back to the Jazz, Love Fantasy, Early Spring. Il participe en coleader à l’étonnant A Molde Album qui réunit Arild Andersen, John Taylor et Bill Frisell.

En 1990, il joue sur la bande sonore du film Dingo aux côtés de Miles Davis où la star fait aussi l’acteur.

Pour un bref moment en 1996, Al Mouzon, retrouve sa passion d’acteur, et il apparaît dans le film de Tom Hanks That Thing You Do où il tient le rôle d’un batteur, et il signe une partie de la musique. Il se met dans la peau de Miles Davis pour interpréter le rôle du trompettiste dans le film The Highlife en 2003, et il apparaît aussi en tant qu’acteur dans les films First Daughter, Ray et The Dukes.

En 1992, il participe à la réunion américano-européenne de Just Friends qui réunit différentes figures du style fusion dans lequel on retrouve Bob Malach (st), Bo Stief (elb), Jasper Van’t Hof (key) et Michaël Urbaniak (vln).

Intéressé par la musique mais aussi par la production et par sa liberté financière, il fonde en 1992 le label Tenacious Records. Il produit alors une série d’albums dont les styles englobent jazz, funk, disco, rap et variété. Tout à la fois, compositeur, producteur, éditeur, musicien, il devient même son représentant de commerce, et je me souviens de l’avoir croisé tenant son propre stand au Midem. Il invente à lui tout seul la formule du 360 assurant à ses produits le total contrôle, de la production à la distribution en passant par les médias et les concerts. Le succès de son album Morning Songs, en 1981, lui avait permis de constater que des titres bien diffusés par les radios pouvaient rapporter gros, et cet album en comportait plusieurs dont certains extraits ont servi longtemps de jingle et ont alimenté ses droits d’auteur et d’éditeur. Son activité dépasse largement celle d’un simple musicien. Il participe à l’entertainment à l’américaine qui symbolise la réussite dans le monde de la musique. Ses compositions et productions ont été utilisées et diffusées dans de nombreuses émissions télévisées d’ABC's Daytime Television, CBS, NBC, des séries à succès telles Santa Barbara, Général Hospital, Sunset Beach, Runaway With Richs and Famous… et même des émissions de sports.

Outre les musiciens déjà cités, Al Mouzon a collaboré avec George Benson, Dizzy Gillespie, Stanley Clarke, Les McCann, Ronnie Laws, Klaus Doldinger's Passport, Ron Carter, Azar Lawrence, Joey DeFrancesco, Michel Legrand, Stanley Turrentine, Hubert Laws, Chet Baker, Randy et Michael Brecker, Ernie Watts, Sonny Rollins, Wallace Roney, Arturo Sandoval, Christian McBride, Kenny Barron, Cedar Walton, George Coleman, Billy Harper, Dave Grusin, Russ Freeman, Kenny G, Horace Parlan, etc., et il a servi la musique auprès de grandes dames du jazz & beyond telles que JoAnne Brackeen, Celia Cruz, Gloria Lynn, Gloria Coleman, Denise Williams, Freda Payne, Shirley Scott, Anita O'Day, Betty Davis…

Ses nombreuses participations au monde du rock et de la variété avec Stevie Wonder, Eric Clapton, Jeff Beck, Carlos Santana, Robert Plant, etc., lui ont permis d’accéder en 1995 au rang de membre du Rock & Roll Hall of Fame.

En 2014, sollicité par le producteur Gerry Gallagher, il participe à l’album El Chicano qui réunit différentes vedettes du rock latin et enregistre en 2016, pour le même producteur, deux titres qui semblent être sa dernière contribution à l’histoire de la musique.

Site du label Tenacious Records
www.tenaciousrecords.com     

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