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Chroniques CD-DVD






© Jazz Hot n°671, printemps 2015

Des extraits de certains de ces disques sont disponibles sur Internet. Pour les écouter, il vous suffit de cliquer sur les pochettes signalées par une info-bulle.


Ronald Baker Quintet
Celebrating Nat King Cole

I'm Lost / Five Brothers, That Ain't Right, Walkin' My Baby Back Home / Swingin' My Baby Back Home, L-O-V-E, Suite for Nat, Gee Baby, Ain't I Good to You, Come Along with Me, Quizas, Quizas, Quizas, Straighten up and Fly Right
Ronald Baker (tp, voc, arr), Jean-Jacques Taïb (ts, cl), Alain Mayeras (p, arr), David Salesse (b, arr), Mario Gonzi (dm) +China Moses (voc), Michele Hendricks (voc), Jesse Davis (as) + The Alhambra-Colbert String Orchestra
Enregistré en novembre 2013, Rochefort (17)
Durée : 1' 04' 16''
Cristal Records 224 (Harmonia Mundi)


Depuis plusieurs années, l’univers de Nat King Cole se trouve être l’objet d’une relecture de la part d’artistes et/ou de groupes à l’esthétique très diverse. Dans la continuité classique du pianiste jazzman, on se souvient de l’album très maîtrisé,
Hey Nat!, de Stan Laferrière (Djaz Records 537 2 , 2000) et de la non moins fine contribution de Jacques Schneck dans son 3 for Swing Joue et chante Nat King Cole (JS2012, 2012). En 1998, Marcus Roberts avait donné une version modernisée de la tradition avec Cole After Midnight (Columbia 69781). Et plus près de nous, un artiste qu’on n’attendait pas dans un tel registre, David Murray, proposait en 2011, avec son Cuban Ensemble qui tourna dans de nombreux festivals européens, un Plays Nat King Cole en Español (Universal 0602527538709) pour le moins exotique et fort éloigné de ses racines jazz naguère "hotement" revendiquées. Nat a toujours fasciné ses collègues musiciens de jazz ; en un temps où le jazz n’était encore que musique d’une civilisation, voire d’une seule culture, qui n’avait pas encore flirté avec les sirènes du showbiz, ses collègues ont vu dans sa réussite – ambition générale répondant à un problème d’importance majeure dans la société américaine – de chanteur de « variété internationale » une manière de sortir de l’ombre, de la confidentialité culturelle communautaire, de l’underground des adeptes et même des misères de leur ghetto. Par ailleurs, après l’orgie des dissonances contemporaines, l’agressivité harmonique des novations musicales, l’insipidité des fusions diverses et la culture hors-sol des world music, la construction rigoureuse et le lyrisme (le chant s’entend) sans mièvrerie de l’univers jazz bien enraciné, comme très présent dans le répertoire de King Cole, n’ont pas manqué de séduire des artistes parvenus à la maturité ; revenus des éphémères surprises de la nouvelle cuisine, les gouteuses friandises d’oncle Nat, comme le souvenir sonore, madeleine de temps moins incertains, les ravissent ; au moins autant que le public lassé d’essais trop peu souvent aboutis.
Sans complaisance, ce
Celebrating King Cole s’inscrit par conséquent dans la tendance générale de notre temps à la recherche de fondements plus assurés et les participants – qui ont tous passé la quarantaine et n’ont plus besoin d’en "remontrer" pour exister – de cette session en éprouvent un plaisir évident. Mises à part quelques incursions dans les années 50 ou 60 le répertoire de l’album est essentiellement emprunté à la période américaine des années 1940, celle durant laquelle King Cole continue, bien qu’étant déjà entré en « variété », à se nourrir de sa culture jazz.
Il convient de souligner la tenue d’ensemble du Ronald Baker Quintet, ses qualités musicales. Ce groupe joue une musique qu’il maîtrise parfaitement ; c’est du jazz, avec son ingrédient essentiel, le swing, qu’il sert avec intelligence et sensibilité au moyen de tous les outils de cet idiome. Les arrangements sont, tant pour le quintet que pour les cordes, remarquables d’équilibre et de clarté. Ici les musiciens sont sollicités avec subtilité dans leur talent individuel déjà grand et dans leurs ensembles ardus et parfois "tordus" dans la mise en place (« Swingin’ My Baby Back Home ») par de formidables orchestrations, dont le lyrisme, sans glisser dans la guimauve – ce qui n’est pas évident avec des cordes –, n’est jamais absent. Ça swingue toujours.
L’organisation des moments musicaux dans l’album n’est pas étrangère au rendu de chaque pièce en relation avec celles qui l’entourent. Au quatre premières plages enlevées d’un jazz classique festif, qui "balance" de riffs en 4/4, correspondent les quatre dernières au ton plus grave et de rythme moins convenu et plus "incertain" (la mise en place recherchée du tempo en
ostentino sur « Quizas », comme l’enchaînement de « Smile » vers « For Sentimental Reasons » sur le leitmotiv initial installé par le piano de Mayeras, est d’une grande finesse et superbement amené). Et l’album n’en termine pas moins sur un conseil joyeux, « Straighten up and Fly Right », pour retrouver sa joie comme il se doit dans une évocation de King Cole. Entre ces deux quatrains, la Suite for Nat, construite autour d’un leitmotiv principal "façon destin" servant de liaisons entre les cinq mouvements, est conçue comme une sinfonietta poétique qui permet à l’auditeur de laisser s’écouler le temps des souvenirs et aux musiciens d’évoquer un King Cole faussement glamour, un musicien moins léger et plus intimiste jusqu’à sa tendresse nostalgique dans ses enregistrements qui eurent, en certains moments lourds de la guerre, auprès d’hommes et de femmes séparés par cet évènement, un rôle affectif plus important qu’il n’y parut à certains.
Au risque de le trahir, il n’était guère possible d’évoquer King Cole sans chanter. Et cet album est entièrement chanté. Pour en casser le risque de la monotonie, Ronald Baker qui s’en donne à cœur joie s’est adjoint deux acolytes femmes, aux caractères sinon opposés du moins bien différents : la musicienne mature pétrie de cette culture, Michele Hendricks, et la nature pétillante toute de spontanéité espiègle de China Moses (« Gee Baby »). L’opposition des styles crée de la variété sur l’ensemble ; et le dosage est assuré avec doigté. Car, chacune dans son registre y apporte sa part de talent et de surprise.

De la même manière, raconter King Cole sans faire appel à un saxophoniste eût été une faute de goût. Nous connaissons ses enregistrements avec Lester Young de 1942, avec Illinois Jacquet et Jack McVea au JATP en 1944. Ayant déjà un ténor dans sa propre formation, Ronald Baker a eu le bon goût de choisir un altiste intervenant en soliste pour mettre de la lumière dans cette musique dont il concevait la tonalité beaucoup moins légère qu’il n’y paraissait. Or King Cole fit appel à douze reprises à un remarquable altiste, aujourd’hui oublié, Willie Smith : la première fois en 1953 dans une grande formation, expérience qu’il eut l’occasion de répéter à plusieurs reprises avec les orchestres de Billy May et Nelson Riddle, mais surtout avec son quartet le 14 septembre 1956, pour enregistrer son formidable album Capitol, Nat « King » Cole and His Trio,
After Midnight. Et Jesse Davis remplit son rôle à la perfection ; car, tout en ayant son style très personnel pétri de parkerisme, il en retrouve dans sa relation avec la musique de King Cole les si particulières couleurs chatoyantes dans les thèmes qui balancent (« L-O-V-E ») et les accents tendres (« The Christmas Song), doux/amères, sombres voire douloureux de l’altiste de Jimmie Lunceford (« Smile », « For Sentimental Reasons », « Nature Boy », « I’m Thru With Love »).
L’Alhambra-Colbert String Orchestra dirigé par Arnaud Chataigner tient sa partie de façon parfaite. Le
voicing des ensembles est remarquable ; il remplit son rôle avec toute la maestria qu’on est en droit d’attendre d’une formation de ce type dans un environnement musical de cette sorte. Si les guests apportent beaucoup à cet album, il serait aussi injuste qu’infondé de passer sous silence la formidable performance des membres du Quintet. Sans jamais écraser ses collègues qu’il soutient et stimule à bon escient, à la batterie Mario Gonzi est omni présent. David Salesse est un accompagnateur irréprochable dans sa mise en place et ses interventions (exposition du thème d’« I’m Thru With Love » ou solo sur « Come Along With Me ») restent aussi équilibrées que justes. Jean-Jacques Taïb fait montre d’une belle maîtrise et d’une spontanéité chaleureuse bienvenue tout au long de cet album ; son chase ts/as avec Jesse Davis sur « L-O-V-E » ne manque pas de gueule. Et ses choruses efficaces sur le blues dans « That Ain’t Right », ou dans « Come Alone With Me », « Swingin’ My Baby » comme sa manière rhythmbluesée façon David Fathead Newman sur « Straighen up » sont de la meilleure veine.
Restent les deux derniers acolytes, Alain et Ronald, qui se sont partagés la mise en déconstruction malicieuse et pleine de surprises des faces rendues célèbres par le
native son de Montgomery. Mayeras a fait un travail d’orchestration exceptionnel, dans les registres aussi multiples que divers de ce volume. Le pianiste, qui se charge de rendre présent Nat, n’est pas moins brillant. Sa manière d’accompagner, qui laisse respirer les solistes (scat dans Swingin’ My Baby ») n’est pas sans rappeler Ellis Larskin et Jimmy Jones, deux de ses héritiers dans la manière de concevoir le rapport voix/piano. Et pour ne rien gâcher, sa générosité spontanée, dans le dialogue piano/orchestre évoque tour à tour un des maîtres de Nat, Fatha Hines, et un des émules de Nat, Ray Charles, dans la partie R&B de « Straighten up and Fly Right ».
Quant à Baker, il rayonne de tous ses talents sur ces 13 plages ; il est tout simplement prodigieux. Ce sera une véritable révélation pour ceux qui n’ont pas eu l’occasion de l’entendre en concert. Tout simplement formidable, le chanteur fait honneur à celui auquel il rend hommage. Quant au
scatter, il lui est évidemment bien supérieur, Nat n’ayant jamais joué dans cette cour. Et comme le trompettiste ne le cède en rien au vocaliste... Ses solos sont extraordinaires de justesse et de feeling. A 47 ans, Ronald a atteint sa pleine maturité musicale ; sa maîtrise instrumentale parfaite et sa musicalité riche – une forme de lyrisme qui convient parfaitement à l’univers colien – le placent parmi les plus grands musiciens aux côtés d’instrumentistes aussi reconnus et prisés que Roy Hargrove par exemple. Cet album fait la preuve que Ronald Baker qu’il est un grand trompettiste que tout amateur de jazz se doit d’entendre et d’écouter.
Celebrating Nat King Cole
est mieux qu’une formidable surprise ; c’est tout simplement un grand album, digne de figurer dans toutes les discothèques. On ne s’y ennuie jamais. Et ça swingue d’enfer !

Félix W. Sportis

Stefano Di Battista / Sylvain Luc
Giu' la testa

I Got a Woman, Touch Her Soft Lips and Part, Dingo Rock, Love Theme From Nata, Arrivederci, Giu’ la testa, Sauvage, La Chanson des jumelles, Otto e Mezzo, Fresh
Stefano Di Battista (as), Sylvain Luc (g), Daniele Sorrentino (b), Pierre-François Dufour (dm, cello)
Date et lieu d'enregistrement non précisés
Durée : 55' 09''
Just Looking Productions 09 (Harmonia Mundi)


Avec
Giu’ la Testa, Sylvain Luc et Stefano Di Battista, soutenus par une rythmique elle aussi franco-italienne, sont allés puisés dans le répertoire des bandes originales de film pour faire émerger leur expression. Tout commence avec un réarrangement de « I Got a Woman » du divin Ray Charles. La guitare crisse comme si elle devait s’élancer pour une course poursuite avec le saxophone de Di Battista. Ce ravalement de titre détonne mais conserve l’esprit funky créé par Ray Charles, comme en témoigne les nombreuses reprises des combo d’organ trio. « Dingo Rock » reste lui aussi dans un registre enlevé et pour cause, ce titre servît de B.O. au film « Dingo » qui évoque la carrière de Miles Davis. Tout dans l’interprétation du quartet renvoie à l’atmosphère créée par Prince of Darkness à la fin des années 80. « Sauvage » de Sylvain Luc possède justement quelque chose de très urbain dans l’expression, un peu de cet esprit fusion qui donne le ton des morceaux précités. Après avoir revisité « Otto e Mezzo » de Nino Rota, les deux artistes ont aussi mis à leur programme des thèmes plus lents. « Touche Her Lips and Part » est le premier de le sorte avec les arpèges étincelants de Luc sur les notes du saxophone soprano. Ensuite, on bascule dans la musique d’Ennio Morricone, un super créateur en la matière. Après le « Love thème de Nata » et ses tourbillonnants effets à la manière d’un Claude Lelouch, les duettistes abordent « Giu’ la testa » de Sergio Leone. Là encore un dialogue se noue et fait décoller les auditeurs alors que Pierre-François Dufour joue des balais pour ouvrir le chemin. « Arrivederci », de Stefano Di Battista, qui ne pourtant pas l’album, synthétise assez bien les émotions vécues par le guitariste et le saxophoniste. Un thème à la fois doux et tendre où les instruments se transforment en projecteur pour mieux diffuser les notes de lumières en cinémascope et faire rêver un peu plus ceux qui auront franchit le pas de tenter l’aventure « Giu’ la testa », (baisse la tête).

Michel Maestracci

Dr. John
Ske-Date-De-Dat. The Spirit of Satch

What a Wonderful World, Mack the Knife, Tight Like This, I've Got the World on a String, Gut Bucket Blues, Sometimes I Feel Like a Motherless Child, That's My Home, Nobody Knows The Trouble I've Seen, Wrap Your Troubles in Dreams, Dippermouth Blues, Sweet Hunk O' Trash, Memories of You, When You're Smiling
Dr. John (p, voc), Sarah Morrow (tb), Terence Blanchard (tp), Blind Boys of Alabama, Dirty Dozen Brass Band, Anthony Hamilton (voc) Bonnie Raitt (voc), Ledisi (voc) Sremekia Copeland (voc), reste du personnel détaillé dans le livret
Durée : 58' 31''
Enregistré en décembre 2013, lieu non précisé
Proper Records 100 (www.nitetripper.com)

Pianiste, guitariste et surtout chanteur à la voix inimitable, auteur d'une trentaine d'albums, Malcom Rebennack, alias Dr. John, toujours entouré d'une panoplie de "gris-gris" tient une place à part dans le monde musical de New Orleans. Quasi unique star du rock puisant aux racines du zydeco, du blues, du boogie-woogie, du jazz des origines, du gospel et du culte vaudou. Tout aussi respectueux qu'iconoclaste, c'est ici le répertoire vocal de Louis Armstrong qu'il reprend, réinventant et bousculant quelque peu les grands succès de Satchmo. Tout en gardant un fil conducteur tenu par la trompette, il les met au goût du jour (de la grande musique commerciale) avec l'aide de quelques grandes figures du rap, du hip hop ou de la néo-soul d'aujourd'hui. La direction de Sarah Morrow (également co-productrice de l'album) et la présence des trompettistes Terence Blanchard, Nicholas Payton, Arturo Sandoval, Wendell Brunious et James Andrews (rien que ça !) garantissent toutefois un "label jazz" irréfutable. On pourra certes ne pas aimer tous les choix : « What a Wonderful World » commencé en gospel et poursuivi en boogaloo sur nappes de cuivres, « Mack the knife » développé en mode rap , «  Tight Like That » (en espagnol) façon ballade cubaine, « Wrap Your Troubles in Dreams » en slow langoureux, ou « While You're Smiling » en cha cha... Mais force est de constater que le résultat est pour le moins surprenant et particulièrement jubilatoire.

Daniel Chauvet

OrriCliquez sur la pochette pour écouter des extraits du disquen Evans
Liberation Suite

Devil Eyes, Juanita, A Lil’ DA.B. a Do Ya, A Free Man ? Liberation Blues, Simply Green, Anysha, Meant to Shine, Mumbo Jumbo, How High the Moon, The Theme, The Night Has a Thousand Eyes
Orrin Evans (p), Sean Jones (tp), JD Allen (ts), Luques Curtis (b), Bill Stewart (dm), Joanna Pascale (voc)
Enregistré les 10 et 11 janvier 2014, New York
Durée : 1h 13' 00''
Smoke Session Records 1409 (Distrijazz)

Le pianiste de Philadelphie présente ici un projet cohérent, notamment autour de la mémoire de Dwayne Burno, auteur de deux compositions. Il s’agit de jazz new-yorkais tendu et féroce tel qu’on aime l’entendre sans concession. Il y a une certaine austérité dans cette approche mais le caractère agressif de cette musique est dans la continuité de l’esprit coltranien, comme en témoigne JD Allen (très coltranien sur « Devil Eyes » et « A Lil’ DA.B. a Do Ya »). Comme Sean Jones est largement influencé par le Miles Davis du second quintet (« Juanita », « Simply Green », démarquage de « Blue in Green »), on ne peut que se sentir en terrain connu. Pourtant, c’est évidemment l’engagement personnel qui fait la différence et les couleurs de « Liberation Blues » permettent de trouver des atmosphères plus contemporaines, entre shuffle et boogaloo, avec des effets sonores expressifs de Sean Jones. « A Free Man ? », avec récitatif d’Orrin Evans, s’inscrit dans la poésie jazz. Un certain nombre de morceaux développent des ambiances méditatives délicates (« Anysha », « Juanita »), y compris avec un caractère blues (« Meant to Shine » qui évoque Mulgrew Miller, dont l’ombre plane sur cette musique). Le « Mumbo Jumbo » de Paul Motian relève du free jazz « organisé » et contraste avec « How High the Moon » qui est joué straight, avec un swing continu et « The Night Has a Thousand Eyes », joliment interprété par la vocaliste de Philadelphie Joanna Pascale. Un bon disque, un peu sombre mais qui ne manque pas d’énergie.

Jean Szlamowicz

JavCliquez sur la pochette pour écouter des extraits du disqueon Jackson
Expression

One by One, Don’t Worry About a Thing, T.J., When I Fall in Love, Think On Me, Mr.Taylor, Where Is the Love, Lelia, Richard’s R.A.P., 88 Strong
Javon Jackson (ts), Orrin Evans (p), Corcoran Holt (b), McClenty Hunter (dm)
Enregistré les 26 et 27 juillet 2013, New York
Durée : 1h 10'
Smoke Session Records 1404 (Distrijazz)

On sait depuis longtemps le styliste colossal qu’est Javon Jackson. Et s’il a pu parfois s’égarer légèrement dans des conceptions un peu trop dans l’air du temps, il est resté un des très solides continuateur de la grande tradition du ténor. Membre des Jazz Messengers d’Art Blakey et de la Jazz Machine d’Elvin Jones, accompagnateur de Cedar Walton ou Freddie Hubbard, il a fait ses classes de manière classieuse et son apprentissage auprès des aînés signifie qu’il est un héritier en ligne directe du patrimoine jazzistique. Il s’inscrit parmi les grands ténors apparut durant les années 90 : Walter Blanding, Willie Williams, Tim Warfield, Theodross Avery, Greg Tardy, James Carter, Eric Alexander… Avec fraîcheur et virilité, il livre un beau set qui comporte uniquement de petites faiblesses de répertoire : le « Don’t Worry About a Thing » de Stevie Wonder, même s’il est bien jazzifié, n’est pas un morceau passionnant et donne un côté pop à la démarche à l’instar de « Where There is Love », comme une concession à l’improbable possibilité qu’une radio grand public s’empare de ces morceaux pour les passer soudain en boucle. Le reste est parfait, notamment le premier morceau, le « One by One » de Wayne Shorter, emblème de Blakey, explosion bluesy mais contrôlée et sans caricature. « T.J. », comme le « Think On Me », de George Cables, montrent un véritable zèle dans la véhémence expressive. Orrin Evans est parfois plus marquant comme sideman que comme leader. C’est le cas ici où il apporte vraiment beaucoup d’engagement dans un style à la fois straight-ahead et très contemporain. La rythmique est omniprésente, Corcoran Holt et McClenty Hunter possédant à la fois l’énergie et le bon goût qui permet, par exemple, d’aborder un blues monkien comme « Mr. Taylor ». Les amateurs de jazz live apprécieront les nombreux moments où l’élan emporte tout le groupe avec beaucoup de swing.

Jean Szlamowicz

Keith Jarrett / Charlie Haden
Last Dance

My Old Flame, My Ship, 'Round Midnight, Dance of the Infidels, It Might As Well Be Spring, Everything Happens to Me, Where Can I Go Without You, Every Time We Say Goodbye, Goodbye
Keith Jarrett (p), Charlie Haden (b)
Enregistré en mars 2007, Oxford (New Jersey)
Durée : 1h 16' 05''
ECM 2399 3780524 (Universal)

Complément attendu de l'album Jasmine publié en 2010, les neuf morceaux de cet album du duo Keith Jarrett/Charlie Haden ont été enregistrés au cours des mêmes séances. Deux titres : « Where Can I Go » et « Goodbye » (qui prend un autre sens avec la disparition du contrebassiste) figuraient d'ailleurs déjà dans Jasmine et sont ici issus d'une autre prise, toute aussi parfaite. Sur des tempos de ballade (à l'exception de la « Dance of the Infidels » de Bud Powell), et en osmose quasi religieuse avec les « standards » qu'ils jouent, Jarrett et Haden s'écoutent avec un mutuel respect. La complicité est parfaite, chacun est attentif à l'autre. Le bassiste, presque minimaliste, ne prend qu'un seul chorus par morceau, choisit ses notes avec soin, simplifie et aère son jeu, pour ne proposer qu'une sorte d'épure idéale d'accompagnement. Comme en recherche de l'essence même de la mélodie, le pianiste s'écarte peu du thème, renonce aux traits brillants trop démonstratifs, se garde de surcharger les harmonies, et ponctue avec retenue les rares solos de basse. Calme, sérénité, plénitude. Une musique magnifique !

Daniel Chauvet

Louis Mazetier
My Own Stuff

Look out Lion I've Got You, Nicolas, Luxembourg Garden Rag, For Dick, Queen Mary Lou, The Tricky Pioneers, A Delicate Brute, Edward in The Lion's Den, The Ferocious Lamb, Big Filthy, Blues For Ray Bryant, Hello Jelly, In The Depth Of Rouffignac, Marianne, Wilsonizing, A Quiet Waltz, That Good Old Stuff
Enregistré les 13 et 14 juin 2011, Meudon (92)
Durée : 47' 51''
Arbors Records 19442 (www.arborsrecords.com)

My Own Stuff publié par Arbors Records a été produit par Louis Mazetier, lui-même. En sorte que l’enregistrement et le mixage ont été réalisés au Studio de Meudon (France), le label n’intervenant que pour sa fabrication aux Etats-Unis. Pourquoi ce pianiste reconnu et souvent sollicité par les organisateurs et les labels en est-il venu, en 2011, à produire lui-même cet album ?

Au-delà de la morosité économique ambiante en période de crise économique mondiale, la raison tient peut-être au fait que, ne répondant pas à une commande, ce volume a correspondu au seul désir de son auteur : il est entièrement constitué de pièces composées par Mazetier. Et si le pianiste est reconnu le compositeur ne l’est pas encore du public, du moins dans l’esprit de producteurs habitués à moins de risques avec des œuvres plus ou moins connues de James P., Jelly, Fats… et autre Duke, mais auteurs patentés. D’autant que l’essentiel du programme est constitué de pièces originales inédites (11 sur 17). Jusqu’à cet opus, Louis était toujours parvenu à intercaler une, deux, voire trois œuvres personnelles dans ses albums ; surtout lorsqu’il s’agissait de concerts enregistrés. Par conséquent pour oser fallait-il, à la fois, avoir l’assurance en ses capacités – de compositeur et d’interprète –, d’une part, avoir la maîtrise du projet économique, d’autre part. Or, disposant d’un répertoire largement renouvelé, il entendait surtout présenter un ouvrage de sa propre facture et d’une veine originale.En effet, onze de ces compositions n’avaient jamais été enregistrées auparavant par Louis Mazetier ; six l’avaient été au moins une fois, dans un de ses albums précédents. Elles ont été écrites entre 1987 (« For Dick »), la plus ancienne, et 2011 (« A Quiet Waltz »), la plus récente ; mais dix pièces ont été composées entre 2008 et 2010. Ces œuvres présentent donc un nouveau Mazetier, celui de la maturité ; il a, au moment de l’enregistrement, 51 ans.
Dans l’esprit des
Children’s Corners (1906 à 1908) de Claude Debussy, qui joua avec les réminiscences de la musique de Philip Sousa entendue à l’Exposition Universelle de 1900 à Paris, Louis ouvre son album sur une pièce à l’espièglerie enfantine en jeu de « cache-cache » avec l’un des ses maîtres, « Le Lion ». Et pour rester dans la gaîté, il le clôt, en revenant comme dans une pièce construite sur le canevas de la ballade, sur un thème évoquant les facéties du premier avec « Ce Bon Vieux Truc » (écrit en 2002), sous-entendu, le bon vieux stride qui swingue et débride : et que ça fait du bien ! Entre ces deux moments, Louis se raconte dans son intimité d’artiste qui reste d’homme dans tous les moments importants de la vie : les maîtres auxquels il doit d’exister musicalement et auxquels il rend hommage dans leur langage reconstruit dans sa relecture aussi originale que personnelle ; le père, ému par ses paternités, qui manifeste sa tendresse, son affection jusqu’à sa gratitude de le maintenir encore vivant pour très longtemps dans un futur incertain (« Nicolas » et « Marianne »).
Mais Louis Mazetier est homme de mémoire ; il a des fidélités musicales anciennes et fortes qu’il perpétue à sa manière dans ses recréations. Ainsi célèbre-t-il, avec une densité nouvelle, la mémoire de Dick Wellstood dans une jolie ballade inspirée de sa musique, « For Dick » écrite en 1987 à la mort du pianiste. Ainsi, reconnaissons-nous ceux qui ont contribué, depuis son adolescence déjà, à construire sa personnalité : Willie « The Lion » Smith déjà évoqué, mais également ses prédécesseurs dans la formation de l’Ecole noire du piano de Harlem, Lucky Roberts (compositeur de « Pork & Beans », 1914, et « Railroad Blues », 1920) Eubie Blake (compositeur de « Ragtime Rag », 1914 et du standard « Memories of You », 1930) dans une évocation synthétisée de leurs styles (« The Tricky Pioneers »). C’est aussi Fats Waller (« Big Filthy ») brossé dans une recomposition inventant la musique suspendue dans le temps. La créolité de Jelly Roll Morton est finement suggérée dans son hispanité néo-orléanaise bien sentie (« Hello Jelly »). L’œuvre de James P. Johnson est restituée dans un portrait tout en subtilité dans « A Delicate Brute2 ». « Wilsonizing » n’est pas moins représentatif d’une approche tout aussi pertinente que nuancée de celle de Teddy Wilson. Quant à « The Lamb »1, sa présentation est musicalement plus tendre que féroce, avant que son titre surréaliste (« The Ferocious Lamb »), à double sens comme toujours dans le
jive, ne le métamorphose en pianiste démoniaque inaccessible aux jeunes présomptueux.
Au demeurant, Louis ne se cantonne par aux accointances de voisinage. Il commence à la troisième plage en donnant à entendre (« Luxembourg Garden Park ») l’évocation, tout droit sorti de son imaginaire, de la période musicale d’avant 1914 dans un style aussi original et personnel que de l’idée qu’il s’en est fait après une si longue fréquentation. Il y a pareillement ce blues superbe, hommage à Ray Bryant orfèvre en la matière, qui puise aux mêmes sources que le maître et réinvente « son blues de toujours ».

Et puis il y a deux pièces exceptionnelles dans leur conception et dans leur interprétation, dédicaces à deux des plus importants compositeurs de l’histoire du jazz.
« Queen Mary Lou », bien sûr en l’honneur de Mary Lou Williams est une prouesse d’intelligence musicale de l’œuvre de cette grande dame. Louis organise l’agencement des périodes de son œuvre, faites de blues, les faisant dialoguer dans l’opposition des tonalités et des rythmes sur le mètre commun, le swing, avant de revenir à sa matrice, le stride dont elle est née. L’interprétation de cette œuvre complexe mais d’une clarté stupéfiante est une pure merveille. Duke et « The Lion » avaient pratiquement le même âge ; bien que n’étant son cadet que deux ans (1899/1897), l’enfant de Washington n’en vouait pas moins une grande admiration à l’ancien combattant interprète invétéré de « La Madelon », qui continua à voir en lui un « jeunot ». Il lui dédicaça une œuvre que les amateurs de jazz connaissent, « The Portrait of the Lion », enregistré par l’orchestre en 1939. Il y eut également « The Second Portrait of the Lion » composé en 1965 et joué en trio de piano (avec Rufus Jones et John Lamb) au Théâtre des Champs Elysées à Paris en mars 1967. Or, malicieusement, Louis Mazetier se propose ni plus ni moins que de placer Duke dans la fosse au Lion ! Entendez par là imaginer la manière dont Ellington aurait pu prolonger l’apport de Smith. Tel est l’objet de la seconde grande composition de cet album, « Edward in the Lion’s Den ». C’est une gageure musicale. Car le jeune Louis ne peut s’empêcher de jouer le dompteur de musique ; jeu de je qui ne manque pas de sel. En fait, si la pièce présente une organisation compositionnelle ellingtonienne avec ses évolutions harmoniques et rythmiques d’après 1956, son univers harmonique reste à dominante impressionniste très léonine d’inspiration debussyste et française (tendance Strayhorn), ne serait-ce que dans son interprétation pianistique plus fluide. En revanche, de par sa conception structurelle, son traitement rythmique autorise le pianiste, d’une part, à cadencer le discours de manière stride (influence Lion), d’autre part, de le ponctuer d’ornementations en forme de ruptures rythmiques et tonales. La pièce apparaît alors plutôt comme le portrait imaginaire de Duke par Le Lion selon Mazetier ! C’est intelligent, fin, et magnifiquement interprété par un pianiste qui brille par le détaché et la clarté du toucher.
Mazetier écrit et joue une musique très personnelle qui, ne retient de celle de ses mentors que le fond et la densité. Empreinte de paix, « In the Depth of Rouffignac » a les couleurs debussystes chères à Billy Strayhorn et « A Quiet Waltz », au ton désuet, a des intonations façon Poulenc. Et c’est dans l’intimité des pièces composées pour ses enfants que Mazetier reste le plus authentique.

Au-delà de la jubilation retenue de souvenirs secrets, « Nicolas » pris sur un tempo de boston (valse lente américaine) présente la sérénité grave d’une méditation de parent sinon inquiet du moins attentif à son devenir. La grâce de « Marianne », au ton apparemment plus léger dans son rythme plus enlevé parfois festif, n’en conserve pas moins, par sa construction – avec exposé en forme de verse et sa coda –, le ton poétique mais mesuré de recommandations paternelles. La naissance des enfants a troublé le créateur dans sa relation au temps. L’art est sa façon de conjurer l’oubli de la mort dans la mémoire des vivants.

Louis Mazetier a composé 43 pièces. Cet album en présente 17, qu’avec beaucoup de distanciation il désigne
Ses Propres Trucs ! L’organisation interne de leur enchaînement dans l’album fait qu’on ne voit pas passer les quelques 48 minutes de l’opus. Toutes sont de superbes compositions interprétées avec un talent exceptionnel. Ces faces, au contenu aussi varié que pertinent, qui sollicitent la curiosité et l’intelligence autant que l’oreille, jamais n’agacent ou n’insupportent. Sa pensée musicale est dense dans la clarté. Pour être généreux, Mazetier n’est pas bavard. La sensibilité se dissout dans la logorrhée.
My Own Stuff
est un grand disque, l’un des plus beaux que Louis Mazetier ait enregistrés. C’est en tout état de cause le plus fort et le mieux abouti. Le piano étant superbe et l’enregistrement parfait.
Félix W. Sportis

1. « The Lamb » (l’agneau) est le surnom, par abréviation, de Donald Lambert. Mais dans l’argot d’Harlem, le jive, des années 1940, le terme était employé pour désigner « l’innocent du village », l’individu sans malice facile à abuser ; cf. Clarence Major, Juba to Jive – A Dictionary of African-American Slang, Penguins Books, New York 1994, 554 p (p 275).
2. « The Brute » était le surnom
de James P. Johnson. 


Metismatic & Guests
Bad Safari

Bad Safari, Shapes, Le Printemps d’en Face, Le Funambule somnambule, Digo Sim, Out of Time, Introlude, La Cuenta, Hope, Alma Alta, On ira où ?

Romain Perda (balafon, cavaquinho, métaux), Brice Berda (tu, saxhorn, flugabone) Mathieu Miteran (cello), Alex Belair (perc) + Anissa Bensalah (voc), Amina Mezaache (fl), Michael Havard (ts), Joachim Govin (b), Jonathan Edo (p)
Date et lieu d'enregistrement non précisé
Durée : 51' 51''
Quart de Lune (Musicast)

Les quatre jeunes et talentueux garçons du groupe Metismatic proposent, avec Bad Safari, leur deuxième album (trois ans après la sortie de Metismatic) sur lequel ils se sont entourés de cinq invités. Amateurs de balafon, instruments exotiques et « jazz-world », vous allez être ravis ! Metismatic nous emmène avec eux pour un voyage onirique d’une heure autour du monde, entre Afrique occidentale, mélodies tzigano-manouches, rythmes brésiliens et sud-américains, musique arabo-orientale et spiritualité hindou-zen. On ne peut s’empêcher de penser très fort à Jorane, chanteuse et violoncelliste québécoise, ou à l’univers du duo italien Musica Nuda, constitué de Petra Magoni (voc) et Ferruccxo Spinetti (b), le dépouillement du son en moins, la multitude d’instruments en plus. C’est cette richesse musicale, intéressante et audacieuse, qui séduira les adeptes du genre, avides de joyeux délires. Ce délire pourra facilement se transformer en cacophonie pas toujours cohérente pour les amateurs de jazz qui passeront leur chemin.

Opale Crivello


Lia Pale
My Poet's Love

Chapter I : Heinrich Heine
Dear Heinrich, The Better Ones, Everything Has Already Happened to Me, All Those Tears I Drank, Even If My Song is Simple, One Who for the First Time Loves, The Stowaway, Diamonds & Pearls,
Chapter II : Rainer Maria Rilke
You Don’t have to Understand Existence, Only the Girls, Seven Pages of Loneliness, Earnest Hour, Am I a Falcon a storm or a Great Song ?, Between Day & Dream, Where Begins the Night, Dear Rainer Maria,
Lia Pale (voc, fl), Mathias Rüegg (comp, arr, p, hammond, melodica), Ingrid Oberkanins (perc), Hans Strasser (b) et selon les thème, tp & flh : Juraj Bartos, Dominique Fuss, Richard Köster, Thomas Gansch, Matthieu Michel, Mario Rom
Enregistré en 2014, Zurich et Vienna
Durée : 1h 00’ 50”
EmArcy 00602547134387 (Universal)

Dans son nouvel enregistrement, My Poet’s Love, Lia Pale reste fidèle à l'esprit de son précédent opus – Gone Too Far, Jazz Hot n°666 – réunissant ses amours: le jazz et les grands textes de la littérature et de la poésie européennes pour une savante synthèse dont elle a le secret car les atmosphères, sa voix autant que son phrasé précis et expressif, peignent les contours d’un monde original, porté par une forte personnalité, un vrai plaisir car on ne pense à aucun moment à la comparer à une autre voix du jazz: Lia Pale est déjà simplement Lia Pale, naturelle et sophistiquée, sans maniérisme ou mimétisme, avec ses recherches, sa culture, son talent de musicienne accomplie.
Car musicienne parmi les musiciens, elle a réuni une belle formation de jazz parmi lesquels on retrouve l’indispensable et universel pianiste Mathias Rüegg qui compose et arrange avec subtilité, l’excellent Hans Strasser, la délicate et très musicale Ingrid Oberkanins, parfaite aux percussions, avec également dans cet enregistrement une volonté de marier sa voix à celle de la trompette, peut-être un clin d’œil à la tradition, car la trompette ou le fluglehorn et la voix sont un des plus beaux alliages sonores du jazz, une tradition encore active, depuis Louis Armstrong et Billie Holiday: Lia Pale a ainsi invité selon les thèmes les brillants et virtuoses Juraj Bartos («Diamonds & Pearls», «Where Begins the Night»), Dominique Fuss («Even If My Song Is Simple», «One Who for the First Time Loves» ), Richard Köster («Only the Girls», «You Don’t have to Understand Existence»), Thomas Gansch également intéressant («The Better Ones»), Matthieu Michel («Am I a Falcon a Storm or a Great Song?»), Mario Rom («Seven Pages of Loneliness»), chacun apportant sa personnalité, son timbre et ses couleurs aux poèmes dont la thématique – l’amour, la mort, la vie – empreints de mélancolie, de nostalgie et d’espoir sont magnifiquement mis en valeur par les compositions et arrangements du grand mathias rüegg (il tient à ce que son nom ne commence pas par des capitales), qui réunissent comme souvent les univers du jazz, de la tradition européenne, savante et populaire comme par exemple le beau contre-chant au melodica sur «Between Day & Dream». Sa complicité esthétique avec Lia Pale, l’aboutissement de ce bel objet artistique qu’est cet enregistrement entretient, après Gone Too Far, l’espoir d’une belle œuvre en devenir.
Sont  invités dans ce salon de poésie organisée par Lia Pale, des textes de la littérature germanique « romantique » (Heinrich Heine, Rainer Maria Rilke), car l’un comme l’autre, qui appartiennent à des périodes différentes (début du XIXe siècle pour Heine, et fin du XIXe-début du XXe pour Rilke), ont la particularité d’avoir été des artistes vivant leur art comme leur vie, avec passion et romantisme, aux quatre coins de l’Europe (Heine meurt à Paris et Rilke en Suisse), rencontrant pays, arts et artistes, la musique pour Heine, la peinture et la sculpture pour Rilke. 

Lia Pale se voue à son art corps et âme, et ses racines culturelles sont gravées en elle comme le suggère assez directement la couverture de l’album.  Sa culture personnelle, musicale, littéraire et artistique, n'hésite pas à se mettre en mouvement, à se confronter à son temps, à affirmer sans détour ce qu’elle est, avec une curiosité fertile, une soif artistique et une authenticité digne de ce que le monde artistique a eu de meilleur en Europe aux siècles de Heine et Rilke, et dans le jazz aux Etats-Unis de l’âge d'or. La fraîcheur de sa voix, naturelle, la précision de la mise en place, la justesse des choix nés de la rencontre avec le jazz et Mathias Rüegg, font de ce disque un moment de plaisir exigeant, qui élève le cœur et l’esprit. La recherche de la beauté existe encore en art, et c'est une bonne nouvelle.
Yves Sportis


Piano Summit - Finale
Stride + Swing

Titres détaillés dans le livret
Paolo Aldeghiri, Ehud Asherie, Chris Hopkins, Bernd Lhotzky, Louis Mazetier, Rossano Sportiello, Stephanie Trick (p), Nicki Parrott (b, voc), Peter Pfister (vln)
Enregistré les 23 et 24 octobre 2010, Alte Kirshe Boswil (Suisse)
Durée : 1h02' 53'' (CD) + 1h 04' 56'' (CD) + 2h 03' 22'' (DVD)
Jazz Connaisseur 1058-0 (www.jazzconnaisseur.ch)


A Boswil, en Suisse, se tenait, depuis 1994, un festival de piano qui devait d’exister à la participation amicale du regretté Ray Bryant. Et donc, chaque année, son initiateur, Jörg Koran, y organisait une manifestation réunissant quelques uns des plus brillants pianistes du jazz qui swingue, de Peter Ecklun à Eric Reed, en passant par Dado Moroni, Claude Bolling, Barry Harris ou Mulgrew Miller. Ces concerts ont déjà fait l’objet d’enregistrements d’instrumentistes y ayant participé ; certains ont été publiés en albums, parmi lesquels ceux de Louis Mazetier, Rossano Sportiello, Paolo Alderighi ou Dick Hyman sous le label Jazz Connaisseur animé par Jörg et son épouse, Doris. Il convenait de replacer ce coffret Stride + Swing dans son contexte. Il comprend deux CDs et un DVD rendant assez largement compte du festival exceptionnel de 2010, qui fut le dernier de seize années d’existence.
Pendant
ce week-end d’octobre 2010, le Stride + Swing Piano Summit présenta les huit pianistes plus haut mentionnés auxquels fut, en plusieurs occasions, associée la contrebassiste et chanteuse Nicki Parrott. Le programme, qui comprend des pièces écrites entre 1910 et 2009 – les quelques unes composées par les solistes eux-mêmes –, est pour une large part emprunté aux standards de Tin Pan Alley mais aussi au grand répertoire des maîtres du jazz toutes époques confondues : James P. Johnson, Willie The Lion Smith, Fats Waller, Duke Ellington, Earl Hines, Bix Beiderbecke, Albert Ammons, Django Reinhardt, Thelonious Monk et Hank Jones.
Illustrant la large diffusion du jazz dans le monde depuis l’après Première guerre, ces huit jeunes pianistes (ils n’avaient, à l’époque, pas cinquante ans) nourris de la tradition du
Harlem stride viennent de tous les pays : issus du foyer originel, Chris Hopkins (également saxophoniste alto) et Stephanie Trick, comme la contrebassiste Nicki Parrott, sont américains ; de France, pays qui le premier dans l’histoire reconnut le jazz en tant qu’art, Louis Mazetier est originaire ; Bernd Lhotzky est germano-français ; Ehud Asherie, qui vit depuis de longues années à New York, est israélien ; quant à Paolo Alderighi et Rossano Sportiello, ils s’inscrivent dans cette riche école italienne du jazz qui, dans l’après Seconde guerre, a donné de si nombreux musiciens de grand talent.
Par ailleurs, ces musiciens, qui se répartissent également en deux groupes de quatre, l’un résidant en Europe et l’autre en Amérique, ont reçu une formation très semblable. Mis à part Louis Mazetier (le plus âgé et le moins "professionnel"), qui tient sa culture pianistique d’une auto-formation exclusivement jazzique très personnelle, tous ont acquis leurs compétences musicales en suivant un cursus de haut niveau au sein de conservatoires. Trick, Lhotzky, Hopkins, Alderighi et Sportiello sont d’authentiques concertistes.

Au-delà de leur grande technique et d’un répertoire très largement commun, le détail du choix des pièces par chacun révèle leurs origines éducatives et leurs parcours jazziques propres.
Ainsi, Berndt Lhotzky repère la curiosité, « Odeon », tango brésilien d’Ernesto Nazareth, compositeur nourri de musique classique européenne, du début du siècle passé. Chris Hopkins ouvre également la fenêtre sur la part la plus marginale du jazz dans la musique de Bix Beiderbecke, « In a Mist » et « Flashes », comme sur le caractère aussi spécifique qu’exceptionnellement caraïbe (très éloigné du stride harleménite, dont Duke est issu) de la pièce d’Ellington jouée, « Montevideo ». Quant à Rossano Sportiello, son approche du jazz s’inscrit, selon une démarche expressément civilisationnelle, en parallèle de sa formation professionnelle de concertiste de musique classique, dont il possède les codes et les moyens ; en atteste son « Medley » de certaines pièces de Chopin, dont « Nocturne ». Sans entrer dans un long développement, relevons que ce n’est pas la première adaptation de ce morceau ; en 1959, le pianiste Eddie Bernard, qui dans les années 1950 travailla souvent avec Sidney Bechet, avait déjà proposé plusieurs œuvres classiques (de Chopin et Beethoven en particulier), dont celle-ci, dans son album Jazz Arabesques (Pacific). Sans minimiser le talent d’Eddie, qui était grand, le niveau pianistique de Rossano, que l’on peut par ailleurs apprécier sur les autres pièces spécifiquement jazz de cet album, en donne une interprétation pianistiquement remarquable d’une lecture moins superficielle et plus aboutie.
Parallèlement, le second élément intervenant dans ces programmes concerne la relation propre du musicien à la musique, la façon dont il est « entré en jazz ».
Ainsi, qu’ils soient Américains ou Européens, les musiciens de formation académique germanique (Bernd ou Chris qui vécut longtemps en Allemagne) ajoutent à leur lecture du stride un « exotisme » particulier déjà signalé, ne serait-ce que par le choix de pièces atypiques, d’une part, et de celles estampillées jazz authentique de par leur compositeur ou de leur interprète historique (James P. Johnson, Willie The Lion Smith, Duke Ellington, Coleman Hawkins sur le DVD), d’autre part. En revanche, tous les autres musiciens, entretenant une relation directe ancienne avec le jazz – et même unique comme chez Mazetier ou Asherie – ont, par voie de conséquence, un accès « plus libre » aux thèmes empruntés au répertoire du stride – standards comme à celui des maîtres du jazz, voire même dans des compositions personnelles répondant aux critères fondamentaux de l’idiome (« Blues for Alfie », « Blues for Joerg », « Ferocious Lamb ») qu’il se sont approprié.
Ces considérations musicologiques indispensables étant posées, il convient d’entrer dans le contenu
stricto sensu de ces quarante huit faces d’une tenue musicale remarquable, certaines relevant de l’exceptionnel. Pour la qualité d’interprétation, le « Bix Medley » de Chris Hopkins, comme « Odeon » de Bernd Lhotzky méritent une écoute attentive ; au-delà de la perfection pianistique, on ne peut manquer d’y relever une réelle finesse chez Chris et une rigueur intelligente dans la respiration de la pièce chez Bernd. Dans l’excellence, sont à retenir : le solo de Stephanie Trick sur un thème peu souvent joué d’Ellington, « Jubilee Stomp » ; « Echoes of Spring » par Chris Hopkins ; la composition jubilatoire du regretté Hank Jones, « Vignette », jouée par Ehud Ashérie et Nicki Parrott ; le « Medley Vernon Duke » traité tout en nuances par Louis Mazetier ; « Ruby My Dear » par Ehud Asherie et Nicki Parrott. Les duos ne sont pas moins remarquables : ceux de Bernd et Louis, sur « I’m Sorry I Made You Cry » et « I Wish I Were Twins » sont directs ; celui du même Bernd et Roassano sur « I’ll See You in My Dreams » est du plus parfait équilibre. Quant à celui de Paolo et de Bernd sur « Who’s Sorry Now », il manifeste toute la fraicheur de deux musiciens en communion.
Il y eut également de l’exceptionnel : dans le respect de la tradition et de son esprit sur « Rippling Waters » ou « Ferocious Lamb » de Louis Mazetier ; la reconstruction de la composition de Monk, « 52nd Street », par Ehud Asherie est exemplaire. Paolo Alderighi est magistral sur « King Porter Stomp » dont il respecte l’économie originale de la pièce ; quant au traitement en forme d’habanera tout en nuances délicatement swinguée – d’esprit ravélien – de la composition de Django, « Manoir de mes rêves », sa perfection rare en fait, peut-être, LA référence. Rossano Sportiello est pianistiquement et musicalement très impressionnant ; sa légèreté et sa souplesse de swing évoquent Jimmie Lunceford, son art du piano Teddy Wilson et sa maîtrise instrumentale le grand Art Tatum. Toutes ses apparitions sont majestueuses et grandissimes : tout est à écouter en tous ses registres d’expression, de sa subtile et tendre composition « Why Did You Tell Me Ilove You » à son extraordinaire version de « Just One Those Things » (qui supporte la comparaison avec celle fameuse de Tatum avec Jo Jones et Red Callender (27 janvier 1956). Et comment ne pas se régaler des
reunions fabuleuses : Mazetier et Asherie, deux authentiques pianistes de jazz (« Drop Me off in Harlem » et « The Mule Walk »), Louis et Paolo ne sont pas mal non plus dans « Stricke up the Band » ; le jeu sur les tonalités de Rossano et Ehud à propos de « Tea for Two » est rempli de finesses et de complicités musicales. A ne pas manquer le grand duo de Rossano et Louis sur la composition de Leon « Chu » Berry, « Christopher Columbus », feu d’artifice musical extraordinaire.
Outre les prestations des musiciens, le DVD nous permet d’assister aux ultimes instants de la manifestation ; il y eut l’émotion du dernier concert et plus encore celle d’un groupe de personnes, dont les musiciens, conscients de la fin d’un cycle festivalier qui tint une grande place dans leur vie.

La chronique de cet album exceptionnel serait incomplète sans mention du livret qui retrace, en mots et en images, l’histoire de cette manifestation originale. Néanmoins, comme nous avons déjà eu l’occasion de le signaler pour certains autres, on peut regretter que ce coffret omette les noms des compositeurs des pièces jouées. En sorte qu’elles ne peuvent être identifiées autrement que par leurs titres bien insuffisants à les resituer pour ceux qui ne sont pas du sérail. Or c’est bien le renouvellement et le rajeunissement du public qu’il convient d’obtenir avec ce type de publication ; l’aspect didactique n’est à négliger.
Que ces légers inconvénients – auxquels la présente chronique a tenté de remédier – ne vous découragent pas. Découvrez ces enregistrements superbes de huit pianistes de talent. Ce Piano Summit – Finale est magnifique ; il justifie de son intitulé : Stride + Swing !
lix W. Sportis

Nicola Sabato
Cruisin' With the Nicola Sabato Quartet

Meatball Serenade, Wabash, I Didn't Know What Time It Was, The Way We Were, Broadway, Too Marvelous for Words, My One and Only Love, Leo Walks in, Lullaby of Birdland, From This Moment On, Willow Weep for Me
Nicola Sabato (b,, arr),Dano Haider (g), Florent Gac (p), Sylvain Glevarec (dm), Benjamin Henocq (dm)

Enregistré le 23 novembre 2013, Pré-St-Gervais (93)

Durée : 1h 05' 59''

Spirit of Jazz NSM003
(www.nicolasabatojazz.com)

C’est au studio de Bopcity qu’en ce samedi de novembre 2013, Nicola Sabato et ses partenaires entrèrent pour enregistrer ce Cruisin’ With the Nicola Sabato Quartet en mémoire de Patrick Saussois et Ted Curson, « deux personnes et musiciens formidables qui ont toujours eu une grande influence sur [sa] vie et [sa] musique ». L’hommage est beau. Il aurait plu à ses dédicataires. Ils auraient été fiers de la tenue musicale de l’œuvre.

Après On a Clear Day, enregistré en 2003 (DJAZ Records 559) et Lined With a Groove, gravé avec Jeff Hamilton (DJAZ records 738-2) en 2006, Crisin’ With the Nicola Sabato Quartet est donc, sept ans après, le troisième album de Nicola Sabato en tant que leader de séance. Au regard des dix années professionnelles par ailleurs bien remplies, c’est peu. Le contrebassiste n’est pas un boulimique du sillon ; il produit peu mais de qualité.
Le programme de ce volume comprend deux compositions originales du leader écrites en 2013 (« Meatball Serenade » et « Leo Walks in ») et neuf autres pièces : deux classiques du jazz – « Wabash » (Cannonbal Adderley, enregistré la première fois par son auteur à Chicago en 1959) et la belle mélodie de George Shearing, « Lullaby of Birdland » (1952) – et sept standards de compositeurs célébrissimes – de Cole Porter et Richard Rodgers à Henri Woode ou Ann Ronell) – de
Tin Pan Alley composés entre 1932 (« Willow Weep for Me ») et 1973 (« Nuestro Anos Felices » habituellement titré « The Way We Were », du nom du film de Sidney Pollack tourné avec Barbara Streisand en 1973). Le choix des thèmes est aussi judicieux que parfaitement équilibré, les morceaux récents s’accordant totalement avec l’esthétique globale du reste de l’album. Ce quartet nous mène en une croisière aux escales improbables. Les moments sculptent cet album de sensations ténues. Les impromptus rendent la promenade musicale pleine de surprises ; les ensembles simples et intelligemment orchestrés, par la scansion de solos aussi libres que structurés, conservent légèreté et souplesse à une musique aérienne.
Les participants de la session maîtrisent la matière et donnent la pleine mesure de leur talent. Le style coloré (jeu de cymbale) et libre de Benjamin Hénocq convient particulièrement bien à l’esprit de la composition de Richard Rodgers, « I Didn’t Know What Time It Was », ou celle de Cole Porter, « From This Moment on », comme au traitement délibérément atypique choisi pour interpréter la
berceuse du pays aux oiseaux. Le drive plus dense et structuré de Sylvain Glevarec confère, par sa force d’impact, une puissance très appréciable à l’interprétation (« Wabash », « Broadway ») comme une rigueur très efficace (« Too Marvelous » ou « Willow Weep ») dans les autres faces au ton plus classique. Dano Heider s’inscrit dans la tradition d’Oscar Moore et d’Irving Ashby : c’est une seconde voix ajoutée à celle du piano (« Too Marvelous ») en même temps qu’un élément essentiel à la ponctuation du discours musical. Ses solos sont fins et bien amenés. Dans le livret, « Beethoven » a fort justement souligné que Nicola ne commet jamais la faute de « sur-jouer », bien qu’étant leader de séance. Ses interventions (expositions de thèmes – « My One and Only Love » ou « Wabash » et ses choruses – « Willow Weep » ou « My One and Only One Love ») restent toujours mesurées. En fait, comme ses maîtres Ray Brown et Paul Chambers, Sabato fait dans cet album, comme dans les précédents, étalage de son grand talent d’accompagnateur présent mais discret : sur tempo classique (« Broadway », « Willow », rapide « From This Moment On » et même très lent particulièrement délicat « Lullaby ») ou sur rythmes plus baroques (« I Didn't Know What Time It Was »).
Dans ce trio bien équilibré, le rôle du pianiste est primordial ; il est le catalyseur en même temps que la voix principale parce que la plus audible. Et de ce point de vue, le travail de Laurent Gac est assez exceptionnel. Il parvient à fédérer toutes les parties tout en faisant entendre sa grande originalité en contrepoint du chant général. Et pour être brillante, sa formidable technique ne parasite jamais son discours judicieux : en toutes circonstances et dans toutes les plages de ce volume, Laurent Gac œuvre dans l’excellence. Bravo !

Cet album est superbe. Embarquez avec
Cruisin’ With the… Le Nicola Sabato Quartet est un bâtiment de grande croisière. Vous ne le regretterez pas.
Félix W. Sportis

XY Quartet
05

Titres détaillés sur le livret
Nicola Fazzini (as), Saverio Tasca (vib), Alessandro Fedrigo (b), Luca Colussi (dm)
Enregistré le 17 octobre 2013, San Biagio Di Callalta (Italie)
Durée : 50' 34''
Nusica.org 352 (www.nusica.org)


Voici le deuxième disque de cet excellent XY Quartet, après Idea F, dont nous avions dit les qualités et notre admiration. Ce deuxième opus ne le cède en rien au premier ; on constate une évolution plus mélodique avec une plus grande place laissée au vibraphone, et des arrangements à quatre voix très bien ficelés, comme par exemple « Spazio Angusto» qui ouvre le disque, avec un beau mariage vibraphone/sax. « H2O » est emblématique du style de ce quartette : intro sur une note sax, une note vibraphone, une de la basse, une ponctuation batterie, puis ça se répond d’une façon lancinante, l’échange s’accélère, se développe, s’enrichit ; arrivent les solos, sax, vibraphone aéré sur ponctuation de la basse : du miel mille fleurs. Nicola Fazzini est une sorte de Steve Lacy au sax alto. « Jon Futura nous vaut une belle intervention de la basse entremêlée dans le trio. « Doppio Sogno » démarre assez jazz classique avec un petit clin d’œil au père des vibraphonistes, Lionel Hampton. Salverio Tasca s’inscrit dans la grande tradition des vibraphonistes, pour preuve son solo sur « Futuritmi », suivi en beauté par la basse. En plus de la pulse le batteur assure un tapis foisonnant sur lequel baigne le quartette, ou bien il joue en contrepoint avec toujours la même pulse.
XY quartet est un groupe original qui joue le plaisir et la beauté sur des compositions originales de Nicola Fazzini et Alessandro Fedrigo. Les fruits ont passé la promesse des fleurs de Idea F.

Serge Baudot